1. Lorsque des demandes ayant le même objet et la même cause sont formées entre les mêmes parties devant des juridictions d'États membres différents, la juridiction saisie en second lieu sursoit d'office à statuer jusqu'à ce que la compétence du tribunal premier saisi soit établie.
2. Lorsque la compétence du tribunal premier saisi est établie, le tribunal saisi en second lieu se dessaisit en faveur de celui-ci.
Aff. C-386/17, Concl. Y. Bot
Motifs 48 : "À cet égard, il convient de relever que, selon les termes mêmes de l’article 24 du règlement n° 2201/2003, le critère de l’ordre public visé à l’article 22, sous a), et à l’article 23, sous a), de ce règlement ne peut être appliqué aux règles de compétence visées aux articles 3 à 14 dudit règlement".
Motifs 49 : "Il importe, dès lors, de déterminer si les règles de litispendance constituent des règles de compétence au même titre que celles figurant aux articles 3 à 14 de ce règlement".
Motifs 50 : "À cet égard, s’il est vrai que les règles de litispendance prévues à l’article 19 du règlement n° 2201/2003 ne figurent pas au nombre des règles de compétence expressément visées à l’article 24 de ce règlement, ce même article 19 fait partie du chapitre II dudit règlement, intitulé « compétence »".
Motifs 51 : "De plus, ainsi que M. l’avocat général l’a relevé au point 77 de ses conclusions, lorsque, comme dans l’affaire au principal, la juridiction première saisie, statuant sur une demande incidente de reconnaissance, vérifie si les règles de litispendance ont été correctement appliquées par la juridiction saisie en second lieu et, partant, apprécie les raisons pour lesquelles cette dernière n’a pas décliné sa compétence, la juridiction première saisie procède ainsi nécessairement au contrôle de la compétence de la juridiction saisie en second lieu. Or, ainsi qu’il a été rappelé au point 45 du présent arrêt, l’article 24 du règlement n° 2201/2003 ne l’autorise pas à effectuer un tel contrôle".
Motifs 52 : "Ainsi, nonobstant le fait que l’interdiction énoncée à l’article 24 de ce règlement ne contient pas de référence expresse à l’article 19 dudit règlement, une violation alléguée de ce dernier article ne permet pas à la juridiction première saisie, sous peine de contrôler la compétence de la juridiction deuxième saisie, de refuser la reconnaissance d’une décision rendue par cette dernière en violation de la règle de litispendance contenue dans cette disposition (voir, par analogie, s’agissant de l’article 15 du règlement n° 2201/2003, arrêt du 19 novembre 2015, P, C‑455/15 PPU, EU:C:2015:763, point 45)".
Motifs 53 : "Ces considérations sont également applicables aux règles de litispendance figurant à l’article 27 du règlement n° 44/2001, en matière d’obligations alimentaires, dès lors que l’article 35, paragraphe 3, de ce règlement prévoit également qu’il ne peut être procédé au contrôle de la compétence des juridictions de l’État membre d’origine".
Motifs 56 et dispositif : "Les règles de litispendance figurant à l’article 27 du règlement (CE) n° 44/2001 du Conseil, du 22 décembre 2000, concernant la compétence judiciaire, la reconnaissance et l’exécution des décisions en matière civile et commerciale, et à l’article 19 du règlement (CE) n° 2201/2003 du Conseil, du 27 novembre 2003, relatif à la compétence, la reconnaissance et l’exécution des décisions en matière matrimoniale et en matière de responsabilité parentale abrogeant le règlement (CE) n° 1347/2000, doivent être interprétées en ce sens que, lorsque, dans le cadre d’un litige en matière matrimoniale, de responsabilité parentale ou d’obligations alimentaires, la juridiction deuxième saisie adopte, en violation de ces règles, une décision devenue définitive, elles s’opposent à ce que les juridictions de l’État membre dont relève la juridiction première saisie refusent, pour cette seule raison, de reconnaître cette décision. En particulier, cette violation ne saurait, à elle seule, justifier la non-reconnaissance de ladite décision au motif de sa contrariété manifeste à l’ordre public de cet État membre".
Aff. C-438/12, Concl. N. Jääskinen
Dispositif 2 (et motif 60) : "L’article 27, paragraphe 1, du règlement n° 44/2001 doit être interprété en ce sens que, avant de surseoir à statuer en application de cette disposition, la juridiction saisie en second lieu est tenue d’examiner si, en raison d’une méconnaissance de la compétence exclusive prévue à l’article 22, point 1, de ce règlement, une décision éventuelle au fond de la juridiction saisie en premier lieu ne sera pas reconnue dans les autres Etats membres, conformément à l’article 35, paragraphe 1, dudit règlement".
Procédures 2014, comm. 172, obs. C. Nourissat
Europe 2014, comm. 285, obs. L. Idot
Rev. crit. DIP 2014. 704, note L. d'Avout
D. 2015. 1056, note H. Gaudemet-Tallon et F. Jault-Seseke
Dispositif : "L’article 27, paragraphe 2, du règlement (CE) n° 44/2001 (…), doit être interprété en ce sens que, sous réserve de l’hypothèse où le tribunal saisi en second lieu disposerait d’une compétence exclusive en vertu de ce règlement, la compétence du tribunal saisi en premier lieu doit être considérée comme établie, au sens de cette disposition, dès lors que ce tribunal n’a pas décliné d’office sa compétence et qu’aucune des parties ne l’a contestée avant ou jusqu’au moment de la prise de position considérée, par son droit procédural national, comme la première défense au fond présentée devant ledit tribunal".
Décision antérieure : Civ. 1e, 19 déc. 2012, n° 11-19516 - Décision ultérieure : Civ. 1e, 24 sept. 2014, n°11-19516
Europe 2014, comm. 186, note L. Idot
Procédures 2014, comm. 143, obs. C. Nourissat
JDI 2014. 900, note D. Rooz
Rev. crit. DIP 2014. 694, note H. Muir Watt
JDE 2014. 283, note P. Wautelet
Aff. C-116/02, Concl. P. Léger
Dispositif 2 : "L'article 21 de la convention du 27 septembre 1968 doit être interprété en ce sens que le juge saisi en second lieu et dont la compétence a été revendiquée en vertu d'une clause attributive de juridiction doit néanmoins surseoir à statuer jusqu'à ce que le juge saisi en premier lieu se soit déclaré incompétent".
Dispositif 3 : "L'article 21 de la convention du 27 septembre 1968 doit être interprété en ce sens qu'il ne saurait être dérogé à ses dispositions lorsque, d'une manière générale, la durée des procédures devant les juridictions de l'État contractant dans lequel le tribunal saisi en premier lieu a son siège est excessivement longue".
CDE 2008. 175, note G.P. Romano
DMF 2005. 94, note P. Bonassies et P. Delebecque
Rev. crit. DIP 2004. 444, note H. Muir Watt
JDI 2004. 641, obs. A. Huet
D. 2004. 1046, note C. Bruneau
Europe 2004, comm. 58, obs. L. Idot
Dispositif 2 : "Sous réserve de l'hypothèse où le juge saisi en second lieu disposerait d'une compétence exclusive prévue par la convention et, notamment, par son article 16, ledit article 21 doit être interprété en ce sens que, lorsque la compétence du juge saisi en premier lieu est contestée, le juge saisi en second lieu ne peut que surseoir à statuer, au cas où il ne se dessaisirait pas, sans pouvoir examiner lui-même la compétence du juge saisi en premier lieu".
JDI 1992. 493, obs. A. Huet
Rev. crit. DIP 1991. 769, note H. Gaudemet-Tallon
CDE 1992. 660, note H. Tagaras
Pourvoi n° 16-13809
Motifs : "Vu l'obligation pour le juge de ne pas dénaturer l'écrit qui lui est soumis ;
Attendu que, pour accueillir l'exception de litispendance, l'arrêt retient que la juridiction portugaise a été saisie par Mme Y...en 2008, alors que M. X...l'a ssignée en France par acte du 26 mai 2011 ;
Qu'en statuant ainsi, alors qu'il résultait de la citation délivrée par M. X...que la juridiction portugaise avait été saisie le 6 juin 2014, la cour d'appel, qui a dénaturé cet acte, a violé le principe susvisé".
Motif : "Attendu, (...), que, contrairement à ce que soutient le pourvoi, la faculté de surseoir à statuer prévue par l'article 21, alinéa 2, de la Convention précitée n'existe que si la compétence a été contestée devant le premier juge saisi ; qu'en l'espèce, l'arrêt attaqué ayant relevé que la compétence du juge italien n'avait pas été contestée, la critique n'est donc pas fondée".
Rev. crit. DIP 1990. 558, note H. Gaudemet-Tallon
Gaz. Pal. 7 août 1990, p. 125