Aff. C-558/16, Concl. M. Szpunar
Motif 40 : "Ainsi que M. l’avocat général l’a relevé aux points 78 et 93 de ses conclusions, l’article 1371, paragraphe 1, du BGB porte, selon les informations dont dispose la Cour, non pas sur le partage d’éléments patrimoniaux entre les conjoints, mais sur la question des droits du conjoint survivant quant aux éléments déjà comptabilisés au sein de la masse successorale. Dans ces conditions, cette disposition n’apparaît pas avoir pour finalité principale la répartition des éléments du patrimoine ou la liquidation du régime matrimonial, mais plutôt la détermination du quantum de la part de la succession à attribuer au conjoint survivant par rapport aux autres héritiers. Une telle disposition concerne, dès lors, principalement la succession du conjoint décédé et non pas le régime matrimonial. Par conséquent, une règle de droit national, telle que celle en cause au principal, se rapporte à la matière successorale aux fins du règlement n° 650/2012".
Motif 41 : "Par ailleurs, cette interprétation n’est pas contredite par le champ d’application du règlement 2016/1103. En effet, ce règlement, bien qu’adopté en vue de couvrir, conformément à son considérant 18, tous les aspects de droit civil des régimes matrimoniaux, concernant tant la gestion quotidienne des biens des époux que la liquidation du régime matrimonial, survenant notamment du fait de la séparation du couple ou du décès d’un de ses membres, exclut de manière explicite de son champ d’application, conformément à son article 1er, paragraphe 2, sous d), la « succession du conjoint décédé »".
Motif 42 : "Enfin, ainsi que M. l’avocat général l’a également relevé notamment au point 102 de ses conclusions, la qualification successorale de la part revenant au conjoint survivant au titre d’une disposition de droit national, telle que l’article 1371, paragraphe 1, du BGB, permet de faire figurer les informations concernant ladite part dans le certificat successoral européen, avec tous les effets décrits à l’article 69 du règlement n° 650/2012. Selon l’article 69, paragraphe 1, de ce règlement, le certificat successoral européen produit des effets dans tous les États membres, sans qu’il soit nécessaire de recourir à aucune procédure. Le paragraphe 2 de cet article prévoit que la personne désignée dans celui–ci comme étant le légataire est réputée avoir la qualité et les droits énoncés dans ce certificat sans que soient attachées à ces droits d’autres conditions et/ou restrictions que celles qui sont énoncées dans ledit certificat (arrêt du 12 octobre 2017, Kubicka, C‑218/16, EU:C:2017:755, point 60)".
Motif 43 : "Il convient dès lors de constater que la réalisation des objectifs du certificat successoral européen serait considérablement entravée dans une situation telle que celle en cause au principal, si ledit certificat ne comportait pas l’information complète relative aux droits de l’époux survivant concernant la masse successorale".
Dispositif (et motif 44): "L’article 1er, paragraphe 1, du règlement (UE) n° 650/2012 (...) doit être interprété en ce sens que relève du champ d’application dudit règlement une disposition nationale, telle que celle en cause au principal, qui prévoit, lors du décès de l’un des époux, une répartition des acquêts forfaitaire par majoration de la part successorale du conjoint survivant".
Partie requérante: Doris Margret Lisette Mahnkopf
Autre partie à la procédure: Sven Mahnkopf
1. L’article 1er, paragraphe 1, du règlement sur les successions doit-il être interprété en ce sens que le champ d’application du règlement («successsions à cause de mort») vise également des dispositions de droit national qui, à l’instar de l’article 1371, paragraphe 1, du code civil allemand (Bürgerliches Gesetzbuch) (BGB), règlent les questions patrimoniales après le décès d’un époux en augmentant la part légale de l’époux survivant ?
2. En cas de réponse négative à la première question, l’article 68, sous l), et l’article 67, paragraphe 1, du règlement sur les successions doivent-ils être interprétés en ce sens que la part de l’époux survivant peut être inscrite intégralement dans le certificat successoral européen même lorsque cette part résulte en partie d’une augmentation de sa part légale appliquée conformément à une règle patrimoniale telle que l’article 1371, paragraphe 1, BGB ?
S’il convient de répondre négativement en principe à cette question, est-il néanmoins possible, à titre exceptionnel, d’y répondre affirmativement
a) lorsque le certificat successoral a pour seule finalité de permettre aux héritiers d’exercer, dans un autre État membre déterminé, leurs droits sur un bien du défunt situé dans cet État membre et
b) lorsque la décision en matière successorale (articles 4 et 21 du règlement sur les successions) et, indépendamment des règles de conflit appliquées, les questions concernant les droits patrimoniaux des époux doivent être tranchées conformément au même droit national ?
3. En cas de réponse négative aux première et deuxième questions, l’article 68, sous l), du règlement sur les successions doit-il être interprété en ce sens que la part successorale de l’époux survivant majorée en application d’une règle du régime matrimonial peut, mais, en raison de cette majoration, uniquement à titre d’information, être inscrite dans le certificat successoral européen ?