Une personne domiciliée sur le territoire d’un État membre peut aussi être attraite :
1) s’il y a plusieurs défendeurs, devant la juridiction du domicile de l’un d’eux, à condition que les demandes soient liées entre elles par un rapport si étroit qu’il y a intérêt à les instruire et à les juger en même temps afin d’éviter des solutions qui pourraient être inconciliables si les causes étaient jugées séparément ;
Aff. C-832/21, Concl. J. Richard de la Tour
Dispositif : "L’article 8, point 1, du règlement (UE) n° 1215/2012 (…), doit être interprété en ce sens que : plusieurs défendeurs domiciliés dans différents États membres peuvent être attraits devant la juridiction du domicile de l’un d’eux saisie, dans le cadre d’une action en contrefaçon, de demandes formées contre l’ensemble de ces défendeurs par le titulaire d’une marque de l’Union européenne lorsqu’il leur est reproché une atteinte matériellement identique à cette marque commise par chacun, dans le cas où ces défendeurs sont liés par un contrat de distribution exclusive."
Motifs : "Vu l'article 8, point 1, du règlement (UE) n° 1215/2012 (…)
4. La Cour de justice de l'Union européenne (CJCE, 12 juillet 2012, aff. C-616/10) a dit pour droit, à propos de l'article 6, point 1, du règlement (CE) n° 44/2001 du Conseil, du 22 décembre 2000, concernant la compétence judiciaire, la reconnaissance et l'exécution des décisions en matière civile et commerciale, rédigé en des termes identiques à l'article 8 point 1 précité, que ce texte « doit être interprété en ce sens qu'une situation dans laquelle deux ou plusieurs sociétés établies dans différents États membres sont accusées, chacune séparément, dans une procédure pendante devant une juridiction d'un de ces États membres, de contrefaçon à la même partie nationale d'un brevet européen, tel qu'en vigueur dans un autre État membre, en raison d'actes réservés concernant le même produit, est susceptible de conduire à des solutions inconciliables si les causes étaient jugées séparément, au sens de cette disposition. Il appartient à la juridiction de renvoi d'apprécier l'existence d'un tel risque en tenant compte de tous les éléments pertinents du dossier. »
5. Pour déclarer les juridictions françaises incompétentes pour connaître des actes de contrefaçon commis par la société Tyron Runflat en dehors du territoire français, l'arrêt retient que les atteintes prétendument portées en Grande Bretagne et en Allemagne aux parties anglaise et allemande de son brevet européen ne relèvent pas de la même situation de droit que celles portées à la partie française du brevet et que les produits incriminés en France et ceux qui le sont hors du territoire français ne sont pas les mêmes, de sorte qu'il n'y a pas identité de situation de droit et de fait dans les demandes portant sur des actes de contrefaçon commis sur le territoire français et en dehors du territoire, les décisions relatives aux demandes risquant d'être divergentes mais pas inconciliables.
6. En statuant ainsi, alors que la société Hutchinson invoquait les atteintes portées par les sociétés françaises et la société Tyron, en France, en Allemagne et en Grande Bretagne, aux mêmes parties nationales de son brevet européen, concernant le même produit, la cour d'appel, à qui il appartenait de rechercher si le fait de juger séparément les actions en contrefaçon n'était pas susceptible de conduire à des solutions inconciliables, a violé le texte susvisé".
Motifs : "Mais attendu que l'arrêt relève, d'abord, l'imbrication des agissements imputés à la société Assetz finance [courtier anglais en prêt immobilier] et au promoteur, dont le siège social est dans le ressort du juge saisi, puis les relations entre ces codéfendeurs et leur rôle respectif dans la vente et, enfin, les responsabilités pouvant être invoquées à l'encontre de la banque et de la société Assetz finance ; que, de ces énonciations, la cour d'appel, qui a caractérisé l'existence d'un lien de connexité entre les différentes demandes portées devant elle, a pu en déduire que, pour éviter tout risque d'inconciliabilité entre les décisions des juridictions françaises et anglaises, il y avait intérêt à les juger ensemble ; (…)".
Motifs : "Mais attendu que, conformément aux dispositions des articles 8 § 1 et 20 § 1 du Règlement n° 1215/2012 [...], dans le cas d'une action intentée contre l'employeur, le défendeur domicilié sur le territoire d'un Etat membre est attrait, en présence de plusieurs défendeurs, devant le tribunal du domicile de l'un d'eux, à condition que les demandes soient liées entre elles par un rapport si étroit qu'il y a intérêt à les instruire et les juger en même temps afin d'éviter des solutions qui pourraient être inconciliables si les causes étaient jugées séparément ;
Et attendu que la cour d'appel a constaté que le salarié soutenait avoir travaillé au service de l'entreprise utilisatrice pendant huit années dans le cadre de trente huit contrats de missions temporaires conclues avec son employeur, l'entreprise de travail temporaire, et que la relation de travail avait été rompue en janvier 2013, que les demandes indemnitaires étaient formées indifféremment et in solidum contre l'entreprise utilisatrice et contre l'entreprise de travail temporaire, de sorte qu'elles concernaient un seul et même litige; qu'en l'état de ces motifs, dont il résultait que les demandes, susceptibles d'entraîner des décisions contradictoires si elles étaient jugées séparément, s'inscrivaient dans le cadre d'une situation de fait et de droit unique, l'arrêt se trouve légalement justifié au regard des dispositions des articles 8 § 1 et 20 § 1 du Règlement".