1. Sans préjudice de l’article 31, paragraphe 2, lorsque des demandes ayant le même objet et la même cause sont formées entre les mêmes parties devant des juridictions d’États membres différents, la juridiction saisie en second lieu sursoit d’office à statuer jusqu’à ce que la compétence de la juridiction première saisie soit établie.
2. Dans les cas visés au paragraphe 1, à la demande d’une juridiction saisie du litige, toute autre juridiction saisie informe sans tarder la première juridiction de la date à laquelle elle a été saisie conformément à l’article 32.
3. Lorsque la compétence de la juridiction première saisie est établie, la juridiction saisie en second lieu se dessaisit en faveur de celle-ci.
Aff. C-47/18, Concl. Y. Bot
Motif 43 : "Il convient également de relever que, dans la mesure où le législateur de l’Union a explicitement exclu certaines matières du champ d’application du règlement n° 1215/2012, les dispositions de celui-ci, y compris celles présentant un caractère purement procédural, ne s’appliquent pas par analogie à ces matières".
Motif 44 : "Par ailleurs, une telle application méconnaîtrait le système du règlement n° 1346/2000 et porterait, dès lors, atteinte à l’effet utile des dispositions de celui-ci, notamment en ce que, conformément aux articles 3 et 27 de ce règlement, lus à la lumière des considérants 12, 18 et 19 de celui-ci, des procédures secondaires d’insolvabilité peuvent être ouvertes parallèlement à la procédure principale d’insolvabilité, ce que l’article 29, paragraphe 1, du règlement n° 1215/2012 ne permet pas".
Motif 45 : "En outre, ainsi que la Commission l’a fait valoir dans ses observations écrites, s’agissant du système du règlement n° 1346/2000, l’article 31 de celui-ci permet d’éviter le risque de décisions inconciliables en établissant des règles en matière d’information et de coopération en cas de procédures d’insolvabilité parallèles".
Dispositif 2 (et motif 46) : "L’article 29, paragraphe 1, du règlement n° 1215/2012 doit être interprété en ce sens qu’il ne s’applique pas, ni même par analogie, à une action telle que celle en cause au principal, exclue du champ d’application de ce règlement, mais relevant de celui du règlement n° 1346/2000".
Partie requérante: Skarb Pánstwa Rzeczpospolitej Polskiej — Generalny Dyrektor Dróg Krajowych i Autrostrad
Partie défenderesse: Stephan Riel, agissant en qualité d’administrateur judiciaire dans le cadre de la procédure d’insolvabilité dirigée contre Alpine Bau GmbH
Question 1:
L’article 1er, paragraphe 2, sous b), du règlement (UE) n° 1215/2012 (…) doit-il être interprété en ce sens qu’une action en constatation d’une créance au titre du droit autrichien concerne l’insolvabilité au sens de l’article 1er, paragraphe 2, sous b), du règlement Bruxelles I bis et qu’elle est, par conséquent, exclue du champ d’application matériel de ce règlement?
Question 2a (uniquement au cas où la question 1 appellerait une réponse affirmative):
L’article 29, paragraphe 1, du règlement (UE) n° 1215/2012 (…)) doit-il être appliqué par analogie aux actions annexes relevant du champ d’application du règlement n° 1346/2000?
Question 2b (uniquement au cas où la question 1 appellerait une réponse négative ou au cas où la question 2a appellerait une réponse affirmative):
L’article 29, paragraphe 1, du règlement (UE) n° 1215/2012 (…) doit-il être interprété en ce sens qu’une demande ayant le même objet et la même cause est formée entre les mêmes parties lorsqu’un créancier — la requérante –, qui a produit une créance identique (en substance) dans la procédure d’insolvabilité principale autrichienne et dans la procédure d’insolvabilité secondaire polonaise, créance qui a été contestée (pour l’essentiel) par les administrateurs judiciaires concernés, intente, tout d’abord en Pologne contre l’administrateur judiciaire de la procédure secondaire polonaise, puis en Autriche contre l’administrateur judiciaire de la procédure principale — le défendeur –, des actions en constatation de l’existence de créances d’un certain montant?
1. Lorsque des demandes connexes sont pendantes devant des juridictions d’États membres différents, la juridiction saisie en second lieu peut surseoir à statuer.
2. Lorsque la demande devant la juridiction première saisie est pendante au premier degré, toute autre juridiction peut également se dessaisir, à la demande de l’une des parties, à condition que la juridiction première saisie soit compétente pour connaître des demandes en question et que sa loi permette leur jonction.
3. Sont connexes, au sens du présent article, les demandes liées entre elles par un rapport si étroit qu’il y a intérêt à les instruire et à les juger en même temps afin d’éviter des solutions qui pourraient être inconciliables si les causes étaient jugées séparément.
1. Lorsque les demandes relèvent de la compétence exclusive de plusieurs juridictions, le dessaisissement a lieu en faveur de la juridiction première saisie.
2. Sans préjudice de l’article 26, lorsqu’une juridiction d’un État membre à laquelle une convention visée à l’article 25 attribue une compétence exclusive est saisie, toute juridiction d’un autre État membre sursoit à statuer jusqu’à ce que la juridiction saisie sur le fondement de la convention déclare qu’elle n’est pas compétente en vertu de la convention.
3. Lorsque la juridiction désignée dans la convention a établi sa compétence conformément à la convention, toute juridiction d’un autre État membre se dessaisit en faveur de ladite juridiction.
4. Les paragraphes 2 et 3 ne s’appliquent pas aux matières visées dans les sections 3, 4 ou 5 lorsque le preneur d’assurance, l’assuré, un bénéficiaire du contrat d’assurance, la victime, le consommateur ou le travailleur est le demandeur et que la convention n’est pas valide en vertu d’une disposition figurant dans lesdites sections.
1. Aux fins de la présente section, une juridiction est réputée saisie:
a) à la date à laquelle l’acte introductif d’instance ou un acte équivalent est déposé auprès de la juridiction, à condition que le demandeur n’ait pas négligé par la suite de prendre les mesures qu’il était tenu de prendre pour que l’acte soit notifié ou signifié au défendeur; ou
b) si l’acte doit être notifié ou signifié avant d’être déposé auprès de la juridiction, à la date à laquelle il est reçu par l’autorité chargée de la notification ou de la signification, à condition que le demandeur n’ait pas négligé par la suite de prendre les mesures qu’il était tenu de prendre pour que l’acte soit déposé auprès de la juridiction.
L’autorité chargée de la notification ou de la signification visée au point b) est la première autorité ayant reçu les actes à notifier ou à signifier.
2. La juridiction ou l’autorité chargée de la notification ou de la signification visée au paragraphe 1, consigne respectivement la date du dépôt de l’acte introductif d’instance ou de l’acte équivalent ou la date de la réception des actes à notifier ou à signifier.
1. Lorsque la compétence est fondée sur l’article 4 ou sur les articles 7, 8 ou 9 et qu’une procédure est pendante devant une juridiction d’un État tiers au moment où une juridiction d’un État membre est saisie d’une demande entre les mêmes parties ayant le même objet et la même cause que la demande portée devant la juridiction de l’État tiers, la juridiction de l’État membre peut surseoir à statuer si:
a) l’on s’attend à ce que la juridiction de l’État tiers rende une décision susceptible d’être reconnue et, le cas échéant, d’être exécutée dans ledit État membre; et
b) la juridiction de l’État membre est convaincue que le sursis à statuer est nécessaire pour une bonne administration de la justice.
2. La juridiction de l’État membre peut poursuivre l’instance à tout moment si:
a) l’instance devant la juridiction de l’État tiers fait elle-même l’objet d’un sursis à statuer ou d’un désistement;
b) la juridiction de l’État membre estime que la procédure devant la juridiction de l’État tiers ne pourra vraisemblablement pas être conclue dans un délai raisonnable; ou
c) la poursuite de l’instance est indispensable à une bonne administration de la justice.
3. La juridiction de l’État membre met fin à l’instance si la procédure devant la juridiction de l’État tiers est conclue et a donné lieu à une décision qui est susceptible d’être reconnue et, le cas échéant, d’être exécutée dans ledit État membre.
4. La juridiction de l’État membre applique le présent article soit à la demande d’une des parties, soit d’office, lorsque cette possibilité est prévue par le droit national.
Motifs :
"57. L'article 100 du code de procédure civile énonce que si le même litige est pendant devant deux juridictions de même degré également compétentes pour en connaître, la juridiction saisie en second lieu doit se dessaisir au profit de l'autre si l'une des parties le demande. A défaut, elle peut le faire d'office.
58. L'exception de litispendance peut être invoquée en raison de l'instance engagée devant un tribunal étranger également compétent et suppose pour être accueillie une identité de litige c'est-à-dire une triple identité de parties, d'objet et de cause.
59. Il ressort de la procédure que les parties dans les deux instances initiées aux Etats-Unis puis en France ne sont pas les mêmes dès lors que les sociétés EnigmaSoft Ltd et Malwarebytes Limited sont absentes dans la procédure américaine et que contrairement à ce que prétendent les appelantes, leur présence dans la procédure française pour les motifs retenus précédemment n'est ni fictive ni artificielle.
60. De plus les appelantes reconnaissent que les fondements juridiques des deux procédures sont distincts et soutiennent seulement à partir de suppositions que dans le cadre de la procédure américaine la juridiction californienne statuera sur le préjudice mondial incluant sans ambiguïté celui subi en France ce qui est insuffisant pour répondre aux exigences d'identité de cause et d'objet nécessaires au succès de leur prétention.
61. L'exception de litispendance sera en conséquence rejetée et la décision du tribunal sera confirmée de ce chef."
Official Abstract in English:
"14 January 2020 - ICCP-CA RG 19/18332 - Jurisdiction - Articles 7 (2) Regulation Bruxelles I (recast) and 46 of the code of civil procedure
The Court answers the question whether the French court has jurisdiction to rule on a dispute between two American companies and their Irish subsidiary under Article 46 of the Code of Civil Procedure and Article 7(2) of Regulation (EU) No 1215/2012 for alleged anti-competitive acts.
The Malwarebytes companies are being sued under Article 1240 of the Civil Code by the Enigma companies who claim that, following the review of the Malwarebytes anti-virus programs in the United States, they interfered with their own products.
The Paris Commercial Court found that it has jurisdiction on the basis of the criterion of the place where the harmful event occurred, in France, which the Court confirmed considering that Enigma sufficiently established that it suffered damages on the French digital market characterized by the loss of sales due to the online marketing of competing software available on a website intended for the French public, for which it sought compensation in that territory only.
It is held that Enigma, which claims that it is the victim of tortious acts, had in this context the choice to bring the matter before the Commercial Court of Paris, irrespective of the location of one of the events giving rise to the damage located in the United States, where the disputed software had been modified.
The lis pendens exception was not upheld due to the lack of identity of the dispute previously brought in the United States by Enigma against Malwarebytes Inc. although it involved the same facts of on-line interference between competing softwares."
1. Lorsque la compétence est fondée sur l’article 4 ou sur les articles 7, 8 ou 9 et qu’une action est pendante devant une juridiction d’un État tiers au moment où une juridiction d’un État membre est saisie d’une demande connexe à celle portée devant la juridiction de l’État tiers, la juridiction de l’État membre peut surseoir à statuer si:
a) il y a intérêt à instruire et juger les demandes connexes en même temps afin d’éviter des solutions qui pourraient être inconciliables si les causes étaient jugées séparément;
b) l’on s’attend à ce que la juridiction de l’État tiers rende une décision susceptible d’être reconnue et, le cas échéant, d’être exécutée dans cet État membre; et
c) la juridiction de l’État "membre" [rectif. 15 oct. 2020, JO L 338 du 15.10.2020, p. 13] est convaincue que le sursis à statuer est nécessaire pour une bonne administration de la justice.
2. La juridiction de l’État membre peut poursuivre l’instance à tout moment si:
a) elle estime qu’il n’existe plus de risque que les décisions soient inconciliables;
b) l’instance devant la juridiction de l’État tiers fait elle-même l’objet d’un sursis à statuer ou d’un désistement;
c) elle estime que la procédure devant la juridiction de l’État tiers ne pourra vraisemblablement pas être conclue dans un délai raisonnable; ou
d) la poursuite de l’instance est indispensable à une bonne administration de la justice.
3. La juridiction de l’État membre peut mettre fin à l’instance si la procédure devant la juridiction de l’État tiers est conclue et a donné lieu à une décision qui est susceptible d’être reconnue et, le cas échéant, d’être exécutée dans ledit État membre.
4. La juridiction de l’État membre applique le présent article soit à la demande d’une des parties, soit d’office, lorsque cette possibilité est prévue par le droit national.