Compétence protectrice

CJUE, 29 juill. 2024, JX c. FTI Touristik, Aff. C-774/22

Aff. C-774/22, Concl. N. Emiliou

Motif 28 : "Si l’élément d’extranéité est manifestement présent dans l’hypothèse où au moins une des parties a son domicile ou sa résidence habituelle dans un État membre autre que l’État membre de la juridiction saisie, le caractère international peut toutefois également résulter, ainsi que relevé par M. l’avocat général au point 32 de ses conclusions, d’autres facteurs liés, notamment, au fond du litige."

Motif 34 : "Ainsi que relevé par M. l’avocat général au point 51 de ses conclusions, si le rattachement entre la demande en justice et le pays étranger peut être plus au moins fort en fonction du litige en cause, l’appréciation de la question de savoir si un litige comporte un élément d’extranéité devrait demeurer suffisamment aisée pour la juridiction saisie. En l’occurrence, une affaire impliquant une demande d’un voyageur au sujet de problèmes rencontrés dans le cadre d’un voyage à l’étranger, organisé et vendu par un organisateur de voyages, doit, indépendamment de la nature précise de ces problèmes, être considérée comme présentant un caractère international aux fins du règlement n° 1215/2012, la destination du voyage étant un élément facile à vérifier et rendant le régime de compétence judiciaire applicable prévisible pour les parties."

Motif 35 : "En outre, l’interprétation de la notion d’« extranéité » telle qu’elle ressort du point 30 du présent arrêt ne saurait être remise en cause par la référence faite, à titre surabondant, par la jurisprudence antérieure de la Cour à la notion de « litige transfrontalier » qui est définie à l’article 3, paragraphe 1, du règlement n° 1896/2006, comme un litige dans lequel au moins une des parties a son domicile ou sa résidence habituelle dans un État membre autre que l’État membre de la juridiction saisie (voir, en ce sens, arrêts du 7 mai 2020, Parking et Interplastics, C‑267/19 et C‑323/19, EU:C:2020:351, point 34, ainsi que du 3 juin 2021, Generalno konsulstvo na Republika Bulgaria, C‑280/20, EU:C:2021:443, point 33 et jurisprudence citée)."

Motif 36 : "Ainsi que relevé par M. l’avocat général au point 37 de ses conclusions, alors même que le règlement n° 1215/2012 et le règlement n° 1896/2006 relèvent tous les deux du domaine de la coopération judiciaire dans les matières civiles ayant une incidence transfrontière, il n’en découle pas pour autant que les dispositions du règlement n° 1215/2012 devraient être interprétées à la lumière de celles du règlement n° 1896/2006, étant donné que l’objet et le champ d’application de ces deux instruments ne sont pas équivalents."

Motif 37 : "En effet, si le règlement n° 1215/2012 vise à unifier les règles de compétence en matière civile et commerciale et que ces règles doivent, en principe, recevoir application et prévaloir sur les règles nationales de compétence (voir, en ce sens, arrêt du 25 février 2021, Markt24, C‑804/19, EU:C:2021:134, points 30 et 32)), le règlement n° 1896/2006 instaure un instrument uniforme et alternatif de recouvrement de créances, sans toutefois remplacer ou harmoniser les mécanismes de recouvrement de créances prévus par le droit national (voir, en ce sens, arrêts du 14 juin 2012, Banco Español de Crédito, C‑618/10, EU:C:2012:349, point 79, et du 13 juin 2013, Goldbet Sportwetten, C‑144/12, EU:C:2013:393, point 28)."

Motif 41 : "S’agissant, en second lieu, de la question de savoir si l’article 18 du règlement n° 1215/2012 détermine la compétence tant internationale que territoriale de la juridiction concernée, il ressort du libellé même du paragraphe 1 de cet article que les règles de compétence juridictionnelles retenues par cette disposition, lorsque l’action est intentée par un consommateur, visent, d’une part, « les juridictions de l’État membre sur le territoire duquel est domiciliée [l’autre] partie » et, d’autre part, « la juridiction du lieu où le consommateur est domicilié »."

Motif 42 : "Si la première des deux règles ainsi énoncées se borne à conférer une compétence internationale au système juridictionnel de l’État désigné, pris dans son ensemble, la seconde règle confère directement une compétence territoriale à la juridiction du lieu du domicile du consommateur."

Motif 46 : "Ainsi que souligné par M. l’avocat général aux points 59 et 61 de ses conclusions, cette règle protège le consommateur en facilitant l’accès à la justice et montre la préoccupation du législateur de l’Union que le consommateur puisse être découragé d’agir en justice si la juridiction compétente, bien qu’elle soit située dans l’État membre dans lequel il vit, n’est pas celle de son domicile."

Dispositif : "L’article 18 du règlement (UE) n° 1215/2012 (…), doit être interprété en ce sens que : il détermine la compétence tant internationale que territoriale de la juridiction de l’État membre dans le ressort de laquelle est domicilié le consommateur, lorsqu’une telle juridiction est saisie, par ce consommateur, d’un litige l’opposant à un organisateur de voyages à la suite de la conclusion d’un contrat de voyage à forfait, et que ces deux cocontractants sont l’un et l’autre domiciliés dans cet État membre, mais que la destination du voyage se situe à l’étranger."

Bruxelles I bis (règl. 1215/2012)

CJUE, 29 juill. 2024, JX c. FTI Touristik, Aff. C-774/22

Aff. C-774/22, Concl. N. Emiliou

Motif 28 : "Si l’élément d’extranéité est manifestement présent dans l’hypothèse où au moins une des parties a son domicile ou sa résidence habituelle dans un État membre autre que l’État membre de la juridiction saisie, le caractère international peut toutefois également résulter, ainsi que relevé par M. l’avocat général au point 32 de ses conclusions, d’autres facteurs liés, notamment, au fond du litige."

Motif 34 : "Ainsi que relevé par M. l’avocat général au point 51 de ses conclusions, si le rattachement entre la demande en justice et le pays étranger peut être plus au moins fort en fonction du litige en cause, l’appréciation de la question de savoir si un litige comporte un élément d’extranéité devrait demeurer suffisamment aisée pour la juridiction saisie. En l’occurrence, une affaire impliquant une demande d’un voyageur au sujet de problèmes rencontrés dans le cadre d’un voyage à l’étranger, organisé et vendu par un organisateur de voyages, doit, indépendamment de la nature précise de ces problèmes, être considérée comme présentant un caractère international aux fins du règlement n° 1215/2012, la destination du voyage étant un élément facile à vérifier et rendant le régime de compétence judiciaire applicable prévisible pour les parties."

Motif 35 : "En outre, l’interprétation de la notion d’« extranéité » telle qu’elle ressort du point 30 du présent arrêt ne saurait être remise en cause par la référence faite, à titre surabondant, par la jurisprudence antérieure de la Cour à la notion de « litige transfrontalier » qui est définie à l’article 3, paragraphe 1, du règlement n° 1896/2006, comme un litige dans lequel au moins une des parties a son domicile ou sa résidence habituelle dans un État membre autre que l’État membre de la juridiction saisie (voir, en ce sens, arrêts du 7 mai 2020, Parking et Interplastics, C‑267/19 et C‑323/19, EU:C:2020:351, point 34, ainsi que du 3 juin 2021, Generalno konsulstvo na Republika Bulgaria, C‑280/20, EU:C:2021:443, point 33 et jurisprudence citée)."

Motif 36 : "Ainsi que relevé par M. l’avocat général au point 37 de ses conclusions, alors même que le règlement n° 1215/2012 et le règlement n° 1896/2006 relèvent tous les deux du domaine de la coopération judiciaire dans les matières civiles ayant une incidence transfrontière, il n’en découle pas pour autant que les dispositions du règlement n° 1215/2012 devraient être interprétées à la lumière de celles du règlement n° 1896/2006, étant donné que l’objet et le champ d’application de ces deux instruments ne sont pas équivalents."

Motif 37 : "En effet, si le règlement n° 1215/2012 vise à unifier les règles de compétence en matière civile et commerciale et que ces règles doivent, en principe, recevoir application et prévaloir sur les règles nationales de compétence (voir, en ce sens, arrêt du 25 février 2021, Markt24, C‑804/19, EU:C:2021:134, points 30 et 32)), le règlement n° 1896/2006 instaure un instrument uniforme et alternatif de recouvrement de créances, sans toutefois remplacer ou harmoniser les mécanismes de recouvrement de créances prévus par le droit national (voir, en ce sens, arrêts du 14 juin 2012, Banco Español de Crédito, C‑618/10, EU:C:2012:349, point 79, et du 13 juin 2013, Goldbet Sportwetten, C‑144/12, EU:C:2013:393, point 28)."

Motif 41 : "S’agissant, en second lieu, de la question de savoir si l’article 18 du règlement n° 1215/2012 détermine la compétence tant internationale que territoriale de la juridiction concernée, il ressort du libellé même du paragraphe 1 de cet article que les règles de compétence juridictionnelles retenues par cette disposition, lorsque l’action est intentée par un consommateur, visent, d’une part, « les juridictions de l’État membre sur le territoire duquel est domiciliée [l’autre] partie » et, d’autre part, « la juridiction du lieu où le consommateur est domicilié »."

Motif 42 : "Si la première des deux règles ainsi énoncées se borne à conférer une compétence internationale au système juridictionnel de l’État désigné, pris dans son ensemble, la seconde règle confère directement une compétence territoriale à la juridiction du lieu du domicile du consommateur."

Motif 46 : "Ainsi que souligné par M. l’avocat général aux points 59 et 61 de ses conclusions, cette règle protège le consommateur en facilitant l’accès à la justice et montre la préoccupation du législateur de l’Union que le consommateur puisse être découragé d’agir en justice si la juridiction compétente, bien qu’elle soit située dans l’État membre dans lequel il vit, n’est pas celle de son domicile."

Dispositif : "L’article 18 du règlement (UE) n° 1215/2012 (…), doit être interprété en ce sens que : il détermine la compétence tant internationale que territoriale de la juridiction de l’État membre dans le ressort de laquelle est domicilié le consommateur, lorsqu’une telle juridiction est saisie, par ce consommateur, d’un litige l’opposant à un organisateur de voyages à la suite de la conclusion d’un contrat de voyage à forfait, et que ces deux cocontractants sont l’un et l’autre domiciliés dans cet État membre, mais que la destination du voyage se situe à l’étranger."

Bruxelles I bis (règl. 1215/2012)

CJUE, 27 avr. 2023, A1 et A2 c. I, Aff. C-352/21

Motif : "L’article 15, point 5, du règlement (UE) n° 1215/2012 (…), lu en combinaison avec l’article 16, point 5, de ce règlement, doit être interprété en ce sens que :

un contrat d’assurance sur corps de navire portant sur un bateau de plaisance utilisé à des fins non commerciales ne relève pas de cet article 15, point 5."

Bruxelles I bis (règl. 1215/2012)

CJUE, 27 avr. 2023, A1 et A2 c. I, Aff. C-352/21

Motif : "L’article 15, point 5, du règlement (UE) n° 1215/2012 (…), lu en combinaison avec l’article 16, point 5, de ce règlement, doit être interprété en ce sens que :

un contrat d’assurance sur corps de navire portant sur un bateau de plaisance utilisé à des fins non commerciales ne relève pas de cet article 15, point 5."

Bruxelles I bis (règl. 1215/2012)

Concl., 7 mars 2024, sur Q. préj. (DE), 21 déc. 2022, FTI Touristik, Aff. C-774/22

L’article 18, paragraphe 1, du règlement (UE) n° 1215/2012 (…) doit-il être interprété en ce sens qu’il régit non seulement la compétence internationale, mais contient également une règle concernant la compétence territoriale des tribunaux nationaux en matière de contrat de voyage, dont le respect s’impose au tribunal saisi, lorsque le consommateur en tant que voyageur et son cocontractant, l’organisateur de voyages, sont tous les deux domiciliés dans le même État membre alors que la destination du voyage ne se situe pas dans cet État

French

CJUE, 14 sept. 2023, NM c. Club La Costa (UK) plc e.a., Aff. C-821/21

Motif 49 : "[L]es articles 17 à 19 font expressément référence au « contrat conclu par [...] le consommateur », au « cocontractant du consommateur », à « l’autre partie au contrat » conclu par le consommateur, ou encore aux conventions de for passées « entre le consommateur et son cocontractant » (voir, en ce sens, arrêt du 26 mars 2020, Primera Air Scandinavia, C‑215/18, EU:C:2020:235, point 59)."

Motif 50 : "Ces références militent en faveur d’une interprétation selon laquelle, pour l’application desdits articles 17 à 19, un recours introduit par un consommateur ne peut être dirigé que contre le cocontractant de celui-ci (voir, en ce sens, arrêt du 26 mars 2020, Primera Air Scandinavia, C‑215/18, EU:C:2020:235, point 60)."

Motif 51 : "Ainsi, la Cour a jugé que les règles de compétence établies, en matière de contrats conclus par les consommateurs, à l’article 18, paragraphe 1, du règlement Bruxelles I bis s’appliquent, conformément au libellé de cette disposition, seulement à l’action intentée par le consommateur contre l’autre partie au contrat, ce qui implique nécessairement la conclusion d’un contrat par le consommateur avec le professionnel mis en cause (voir, en ce sens, arrêt du 26 mars 2020, Primera Air Scandinavia, C‑215/18, EU:C:2020:235, point 61 et jurisprudence citée)."

Motif 52 : "Une interprétation selon laquelle les règles de compétence en matière de contrats conclus par les consommateurs, établies aux articles 17 à 19 du règlement Bruxelles I bis, s’appliqueraient également dans une situation dans laquelle un contrat entre le consommateur et le professionnel fait défaut ne serait pas conforme à l’objectif, exposé au considérant 15 de ce règlement, consistant à assurer un haut degré de prévisibilité quant à l’attribution de compétence (voir, en ce sens, arrêt du 26 mars 2020, Primera Air Scandinavia, C‑215/18, EU:C:2020:235, point 62)."

Motif 53 : "En effet, la possibilité, pour le consommateur, d’attraire le professionnel devant la juridiction dans le ressort de laquelle se trouve le domicile de ce consommateur est contrebalancée par l’exigence de la conclusion d’un contrat entre eux, dont découle cette prévisibilité pour le défendeur (voir, en ce sens, arrêt du 26 mars 2020, Primera Air Scandinavia, C‑215/18, EU:C:2020:235, point 63)."

Motif 54 : "En outre, même si la Cour a déjà jugé que la notion d’« autre partie au contrat », prévue à l’article 18, paragraphe 1, du règlement Bruxelles I bis, doit être interprétée en ce sens qu’elle désigne également le cocontractant de l’opérateur avec lequel le consommateur a conclu ce contrat et qui a son siège sur le territoire de l’État membre du domicile de ce consommateur (arrêt du 14 novembre 2013, Maletic, C‑478/12, EU:C:2013:735, point 32), cette interprétation reposait toutefois sur des circonstances spécifiques, dans lesquelles le consommateur était d’emblée contractuellement lié, de manière indissociable, à deux cocontractants (arrêt du 26 mars 2020, Primera Air Scandinavia, C‑215/18, EU:C:2020:235, point 64 et jurisprudence citée)."

Motif 56 : "S’agissant de la question de la juridiction de renvoi relative à l’incidence du fait que l’« autre partie au contrat » appartient à un groupe de sociétés sur l’existence d’une compétence judiciaire au titre des dispositions du règlement Bruxelles I bis relatives à la compétence en matière de contrats conclus par les consommateurs, il convient de relever que, à l’exception de l’article 17, paragraphe 2, de ce règlement, qui prévoit un critère de rattachement alternatif lorsque le cocontractant du consommateur n’est pas domicilié sur le territoire d’un État membre, mais possède une succursale, une agence ou tout autre établissement dans un État membre, les articles 17 à 19 dudit règlement ne contiennent aucun élément permettant de considérer qu’il existe un critère de rattachement fondé sur l’appartenance à un groupe de sociétés."

Motif 57 : "En outre, une interprétation de ces articles 17 à 19 permettant de tenir compte de l’appartenance du cocontractant d’un consommateur à un groupe de sociétés en autorisant ce consommateur à intenter une action devant les juridictions de l’État membre sur le territoire duquel est domiciliée chaque société appartenant à ce groupe irait manifestement à l’encontre des objectifs de prévisibilité des règles de compétence prévues par le règlement Bruxelles I bis et serait, dès lors, incompatible avec le principe de sécurité juridique."

Dispositif 1) : "L’article 18, paragraphe 1, du règlement (UE) n° 1215/2012 (…), doit être interprété en ce sens que : l’expression « autre partie au contrat », figurant à cette disposition, doit être comprise comme visant uniquement la personne, physique ou morale, partie au contrat en cause et non d’autres personnes, étrangères à ce contrat, même si elles sont liées à cette personne."

(…)

Dispositif 2) : "L’article 63, paragraphes 1 et 2, du règlement n° 1215/2012 doit être interprété en ce sens que : la détermination, conformément à cette disposition, du domicile de l’« autre partie au contrat », au sens de l’article 18, paragraphe 1, de ce règlement, ne constitue pas une limitation du choix pouvant être exercé par le consommateur au titre de cet article 18, paragraphe 1. À cet égard, les précisions fournies à cet article 63, paragraphe 2, concernant la notion de « siège statutaire » constituent des définitions autonomes."

Bruxelles I bis (règl. 1215/2012)

CJUE, 14 sept. 2023, NM c. Club La Costa (UK) plc e.a., Aff. C-821/21

Motif 49 : "[L]es articles 17 à 19 font expressément référence au « contrat conclu par [...] le consommateur », au « cocontractant du consommateur », à « l’autre partie au contrat » conclu par le consommateur, ou encore aux conventions de for passées « entre le consommateur et son cocontractant » (voir, en ce sens, arrêt du 26 mars 2020, Primera Air Scandinavia, C‑215/18, EU:C:2020:235, point 59)."

Motif 50 : "Ces références militent en faveur d’une interprétation selon laquelle, pour l’application desdits articles 17 à 19, un recours introduit par un consommateur ne peut être dirigé que contre le cocontractant de celui-ci (voir, en ce sens, arrêt du 26 mars 2020, Primera Air Scandinavia, C‑215/18, EU:C:2020:235, point 60)."

Motif 51 : "Ainsi, la Cour a jugé que les règles de compétence établies, en matière de contrats conclus par les consommateurs, à l’article 18, paragraphe 1, du règlement Bruxelles I bis s’appliquent, conformément au libellé de cette disposition, seulement à l’action intentée par le consommateur contre l’autre partie au contrat, ce qui implique nécessairement la conclusion d’un contrat par le consommateur avec le professionnel mis en cause (voir, en ce sens, arrêt du 26 mars 2020, Primera Air Scandinavia, C‑215/18, EU:C:2020:235, point 61 et jurisprudence citée)."

Motif 52 : "Une interprétation selon laquelle les règles de compétence en matière de contrats conclus par les consommateurs, établies aux articles 17 à 19 du règlement Bruxelles I bis, s’appliqueraient également dans une situation dans laquelle un contrat entre le consommateur et le professionnel fait défaut ne serait pas conforme à l’objectif, exposé au considérant 15 de ce règlement, consistant à assurer un haut degré de prévisibilité quant à l’attribution de compétence (voir, en ce sens, arrêt du 26 mars 2020, Primera Air Scandinavia, C‑215/18, EU:C:2020:235, point 62)."

Motif 53 : "En effet, la possibilité, pour le consommateur, d’attraire le professionnel devant la juridiction dans le ressort de laquelle se trouve le domicile de ce consommateur est contrebalancée par l’exigence de la conclusion d’un contrat entre eux, dont découle cette prévisibilité pour le défendeur (voir, en ce sens, arrêt du 26 mars 2020, Primera Air Scandinavia, C‑215/18, EU:C:2020:235, point 63)."

Motif 54 : "En outre, même si la Cour a déjà jugé que la notion d’« autre partie au contrat », prévue à l’article 18, paragraphe 1, du règlement Bruxelles I bis, doit être interprétée en ce sens qu’elle désigne également le cocontractant de l’opérateur avec lequel le consommateur a conclu ce contrat et qui a son siège sur le territoire de l’État membre du domicile de ce consommateur (arrêt du 14 novembre 2013, Maletic, C‑478/12, EU:C:2013:735, point 32), cette interprétation reposait toutefois sur des circonstances spécifiques, dans lesquelles le consommateur était d’emblée contractuellement lié, de manière indissociable, à deux cocontractants (arrêt du 26 mars 2020, Primera Air Scandinavia, C‑215/18, EU:C:2020:235, point 64 et jurisprudence citée)."

Motif 56 : "S’agissant de la question de la juridiction de renvoi relative à l’incidence du fait que l’« autre partie au contrat » appartient à un groupe de sociétés sur l’existence d’une compétence judiciaire au titre des dispositions du règlement Bruxelles I bis relatives à la compétence en matière de contrats conclus par les consommateurs, il convient de relever que, à l’exception de l’article 17, paragraphe 2, de ce règlement, qui prévoit un critère de rattachement alternatif lorsque le cocontractant du consommateur n’est pas domicilié sur le territoire d’un État membre, mais possède une succursale, une agence ou tout autre établissement dans un État membre, les articles 17 à 19 dudit règlement ne contiennent aucun élément permettant de considérer qu’il existe un critère de rattachement fondé sur l’appartenance à un groupe de sociétés."

Motif 57 : "En outre, une interprétation de ces articles 17 à 19 permettant de tenir compte de l’appartenance du cocontractant d’un consommateur à un groupe de sociétés en autorisant ce consommateur à intenter une action devant les juridictions de l’État membre sur le territoire duquel est domiciliée chaque société appartenant à ce groupe irait manifestement à l’encontre des objectifs de prévisibilité des règles de compétence prévues par le règlement Bruxelles I bis et serait, dès lors, incompatible avec le principe de sécurité juridique."

Dispositif 1) : "L’article 18, paragraphe 1, du règlement (UE) n° 1215/2012 (…), doit être interprété en ce sens que : l’expression « autre partie au contrat », figurant à cette disposition, doit être comprise comme visant uniquement la personne, physique ou morale, partie au contrat en cause et non d’autres personnes, étrangères à ce contrat, même si elles sont liées à cette personne."

(…)

Dispositif 2) : "L’article 63, paragraphes 1 et 2, du règlement n° 1215/2012 doit être interprété en ce sens que : la détermination, conformément à cette disposition, du domicile de l’« autre partie au contrat », au sens de l’article 18, paragraphe 1, de ce règlement, ne constitue pas une limitation du choix pouvant être exercé par le consommateur au titre de cet article 18, paragraphe 1. À cet égard, les précisions fournies à cet article 63, paragraphe 2, concernant la notion de « siège statutaire » constituent des définitions autonomes."

Bruxelles I bis (règl. 1215/2012)

Soc., 20 mars 2024, n° 22-22956

Motifs :

"6. Selon l'article 23 du règlement (UE) n° 1215/2012 (…), applicable en vertu de son article 66 aux actions intentées à compter du 10 janvier 2015, il ne peut être dérogé aux dispositions de la section de ce règlement afférente à la compétence en matière de contrats individuels de travail que par des conventions postérieures à la naissance du différend ou qui permettent au travailleur de saisir d'autres juridictions que celles indiquées à cette section. 

7. Aux termes de l'article 21, §1, sous a), dudit règlement, un employeur domicilié sur le territoire d'un État membre peut être attrait devant les juridictions de l'État membre où il a son domicile. 

8. L'arrêt relève, par motifs propres et adoptés, que le GIE est établi en France et que la clause attribuant compétence aux seules juridictions de Singapour pour connaître des différends nés à l'occasion de l'exécution de la relation de travail était stipulée au contrat de travail, en sorte que cette clause est antérieure à la naissance du différend en cause se rapportant à la rupture du contrat de travail. 

9. Il en résulte que ladite clause attributive de juridiction n'est pas opposable au salarié".

Bruxelles I bis (règl. 1215/2012)

Civ. 1e, 15 déc. 2021, n° 19-23666 [Conv. Lugano II]

Motifs :

"3. M. [G] fait grief à l'arrêt de déclarer le tribunal de grande instance de Paris incompétent au profit des juridictions suisses, alors « que le consommateur peut agir contre son cocontractant devant le tribunal du lieu où il est domicilié lorsqu'il est établi que ce dernier dirige des activités commerciales ou professionnelles vers l'Etat dans le territoire duquel le consommateur a son domicile et que le contrat litigieux entre dans le cadre de ces activités ; qu'en énonçant, pour déclarer le tribunal de grande instance de Paris incompétent au profit des juridictions suisses, que M. [V] [G] et Mme [J] [G] n'établissaient pas que l'exécution dont ils se plaignaient était celle d'un contrat au titre duquel la banque dirigeait son activité vers la France, après avoir pourtant constaté que les sociétés Crédit Suisse dirigeaient leurs activités vers le territoire français, dans le cadre desquelles entrait le contrat de location de coffre-fort même dans une agence suisse dès lors qu'il était conclu avec des consommateurs domiciliés en France, la cour d'appel n'a pas tiré les conséquences légales de ses propres constatations dont il résultait que le contrat de location de coffre-fort litigieux entrant dans le cadre de l'une de ces activités bancaires, les époux [G] pouvaient agir devant les juridictions françaises et a violé les articles 15 et 16 de la Convention de Lugano du 30 octobre 2007. »

Réponse de la Cour

Vu les articles 15, § 1, et 16, § 1, de la Convention de Lugano du 30 octobre 2007 concernant la compétence judiciaire, la reconnaissance et l'exécution des décisions en matière civile et commerciale :

4. Il résulte de la combinaison de ces textes que le consommateur, qui conclut un contrat pour un usage pouvant être considéré comme étranger à son activité professionnelle, peut porter devant le tribunal de son domicile l'action dirigée contre son co-contractant lorsque celui-ci exerce des activités commerciales ou professionnelles dans l'État lié par la présente convention sur le territoire duquel le consommateur a son domicile ou qui, par tout moyen, dirige ces activités vers cet État ou vers plusieurs États, dont cet État, et que le contrat entre dans le cadre de ces activités.

5. Pour déclarer le tribunal de grande instance de Paris incompétent au profit des juridictions suisses, l'arrêt retient que, si les sociétés Crédit Suisse ne peuvent être suivies lorsqu'elles affirment qu'elles ne dirigent aucune de leurs activités vers le territoire français, notamment au motif essentiel de la fermeture de l'une de leur succursale en France, au demeurant postérieurement aux faits en débats et alors que ce n'est pas le seul vecteur d'une telle activité dirigée vers l'étranger, il ne peut qu'être constaté, en revanche, qu'il ne ressort d'aucun élément versé aux débats que tel serait le cas pour la location d'un coffre-fort dans une agence suisse.

6. En se déterminant ainsi, sans préciser la nature de l'activité dont elle estimait qu'elle était dirigée vers l'étranger, ni les raisons pour lesquelles la location de coffres-fort en était exclue, la cour d'appel a privé sa décision de base légale.".

Bruxelles I bis (règl. 1215/2012)

CJUE, 20 mai 2021, CNP, Aff. C-913/19

Aff. C-913/19, Concl. M. Campos Sánchez-Bordona

Dispositif 1: "L’article 13, paragraphe 2, du règlement (UE) n° 1215/2012 (…), lu conjointement avec l’article 10 de celui-ci, doit être interprété en ce sens qu’il ne s’applique pas en cas de litige entre, d’une part, un professionnel ayant acquis une créance détenue, à l’origine, par une personne lésée sur une entreprise d’assurance de responsabilité civile et, d’autre part, cette même entreprise d’assurance de responsabilité civile, de sorte qu’il ne fait pas obstacle à ce que la compétence juridictionnelle pour connaître d’un tel litige soit fondée, le cas échéant, sur l’article 7, point 2, ou sur l’article 7, point 5, de ce règlement".

Bruxelles I bis (règl. 1215/2012)

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