Bruxelles I (règl. 44/2001)

CJCE, 13 juil. 2006, GAT, Aff. C-4/03 [Conv. Bruxelles]

Aff. C-4/03Concl. L. A. Geelhoed

Motif 21 : "Quant à la finalité poursuivie [par l’article 16, point 4, de la convention de Bruxelles], il convient d’observer que les règles de compétence exclusive prévues à l’article 16 de la convention ont pour objectif de réserver les litiges visés aux juridictions ayant avec eux une proximité matérielle et juridique".

Motif 22 : "Ainsi la compétence exclusive pour les litiges en matière d’inscription ou de validité des brevets, attribuée aux juridictions des États contractants sur les territoires desquels le dépôt ou l’enregistrement du brevet a été demandé ou a été effectué, est justifiée par le fait que ces juridictions sont les mieux placées pour connaître des cas dans lesquels le litige porte lui-même sur la validité du brevet ou l’existence du dépôt ou de l’enregistrement (arrêt Duijnstee, précité, point 22). Les juridictions de l’État contractant sur le territoire duquel les registres sont tenus peuvent statuer en application de leur droit national sur la validité et les effets des brevets qui ont été délivrés dans cet État. Ce souci d’une bonne administration de la justice revêt d’autant plus d’importance dans le domaine des brevets que, eu égard à la spécificité de la matière, plusieurs États contractants ont mis en place un système de protection juridictionnelle particulier, réservant ce contentieux à des tribunaux spécialisés".

Motif 23 : "Cette compétence exclusive est également justifiée par le fait que la délivrance des brevets implique l’intervention de l’administration nationale (voir, à cet égard, le rapport de M. Jenard relatif à la convention, JO 1979, C 59, p. 1, 36)".

Motif 24 : "S’agissant de la position qu’occupe l’article 16 de la convention [de Bruxelles] dans le système de celle-ci, il y a lieu de relever que les règles de compétence prévues à cet article sont dotées d’un caractère exclusif et impératif qui s’impose avec une force spécifique tant aux justiciables qu’au juge. Les parties ne peuvent y déroger par une convention attributive de juridiction (article 17, quatrième alinéa, de la convention) ni par une comparution volontaire du défendeur (article 18 de la convention). Le juge d’un État contractant saisi à titre principal d’un litige pour lequel une juridiction d’un autre État contractant est compétente en vertu de l’article 16 de la convention doit, d’office, se déclarer incompétent (article 19 de la convention). Une décision rendue en méconnaissance des dispositions dudit article 16 ne bénéficie pas du système de reconnaissance et d’exécution de la convention (articles 28, premier alinéa, et 34, deuxième alinéa, de la convention)".

Motif 25 : "Eu égard à la position qu’occupe l’article 16, point 4, de la convention dans le système de celle-ci et à la finalité poursuivie, il y a lieu de considérer que la compétence exclusive que prévoit cette disposition doit trouver à s’appliquer quel que soit le cadre procédural dans lequel la question de la validité d’un brevet est soulevée, que ce soit par voie d’action ou par voie d’exception, lors de l’introduction de l’instance ou à un stade plus avancé de celle-ci".

Motif 26 : "En premier lieu, permettre au juge qui est saisi d’une action en contrefaçon ou en déclaration de non-contrefaçon de constater, à titre incident, la nullité du brevet en cause porterait atteinte à la nature contraignante de la règle de compétence prévue à l’article 16, point 4, de la convention".

Motif 27 : "En effet, alors que l’article 16, point 4, de la convention n’est pas à la disposition des parties, le demandeur serait en mesure, par la simple formulation des conclusions de sa demande, de contourner le caractère impératif de la règle de compétence posée à cet article".

Motif 28 : "En deuxième lieu, la possibilité ainsi offerte de contourner l’article 16, point 4, de la convention conduirait à une multiplication des chefs de compétence et serait de nature à affecter la prévisibilité des règles de compétence posées par la convention, portant, par voie de conséquence, atteinte au principe de sécurité juridique en tant que fondement de celle‑ci (voir arrêts du 19 février 2002, Besix, C-256/00, Rec. p. I-1699, points 24 à 26, du 1er mars 2005, Owusu, C-281/02, Rec. p. I-1383, point 41, et arrêt de ce jour, Roche Nederland e.a., C-539/03, non encore publié au Recueil, point 37)".

Motif 29 : "En troisième lieu, l’admission, dans le système de la convention, de décisions dans lesquelles des juridictions autres que celles de l’État de délivrance d’un brevet statueraient à titre incident sur la validité de ce brevet multiplierait également le risque de contrariétés de décisions que la convention vise précisément à éviter (voir, en ce sens, arrêts du 6 décembre 1994, Tatry, C-406/92, Rec. p. I-5439, point 52, et Besix, précité, point 27)".

Motif 30 : "L’argument, avancé par LuK et par le gouvernement allemand, selon lequel, d’après le droit allemand, les effets d’une décision statuant à titre incident sur la validité d’un brevet se limitent aux parties à l’instance, ne saurait constituer une réponse adéquate à ce risque. En effet, les effets attachés à une telle décision sont déterminés par le droit national. Or, dans plusieurs États contractants, la décision annulant un brevet a un effet erga omnes. Pour éviter le risque de décisions contradictoires, il serait donc nécessaire de restreindre la compétence des juridictions d’un État autre que celui de délivrance pour statuer à titre incident sur la validité d’un brevet étranger aux seuls cas où le droit national applicable n’attache à la décision à rendre qu’un effet limité aux parties à l’instance. Une telle restriction conduirait cependant à des distorsions, mettant ainsi en cause l’égalité et l’uniformité des droits et des obligations qui découlent de la convention pour les États contractants et pour les personnes intéressées (arrêt Duijnstee, précité, point 13)".

Motif 31 : "Eu égard aux considérations qui précèdent, il y a lieu de répondre à la question posée que l’article 16, point 4, de la convention doit être interprété en ce sens que la règle de compétence exclusive qu’il édicte concerne tous les litiges portant sur l’inscription ou la validité d’un brevet, que la question soit soulevée par voie d’action ou d’exception".

Dispositif (et motif 31) : "L’article 16, point 4, de la convention du 27 septembre 1968 (…), doit être interprété en ce sens que la règle de compétence exclusive qu’il édicte concerne tous les litiges portant sur l’inscription ou la validité d’un brevet, que la question soit soulevée par voie d’action ou d’exception".

Bruxelles I (règl. 44/2001)

CJUE, 12 juil. 2012, Solvay, Aff. C-616/10

Aff. C-616/10Concl. P. Cruz Villalón

Motif 48 : "Il convient, (…), de s’interroger sur la question de savoir si la portée spécifique de l’article 22, point 4, du règlement n° 44/2001, tel qu’interprété par la Cour [dans l'arrêt GAT, CJCE, 13 juil. 2006, n°4/03], se répercute sur l’application de l’article 31 de ce règlement, dans une situation telle que celle en cause au principal, qui concerne une action en contrefaçon dans le cadre de laquelle l’invalidité d’un brevet européen a été soulevée, à titre incident, comme moyen de défense contre l’adoption d’une mesure provisoire visant l’interdiction de contrefaçon transfrontalière".

Motif 49 : "À cet égard, il y a lieu de relever que, selon la juridiction de renvoi, le juge saisi à titre incident ne rend pas de décision définitive en ce qui concerne la validité du brevet invoqué, mais évalue comment le juge compétent, en vertu de l’article 22, point 4, du règlement n° 44/2001, statuerait à cet égard, et refusera de prendre la mesure provisoire sollicitée s’il estime qu’il existe une chance raisonnable et non négligeable que le brevet invoqué soit annulé par le juge compétent".

Motif 50 : "Dans ces circonstances, il apparaît que le risque de contrariétés des décisions évoqué au point 47 du présent arrêt [en référence à l'arrêt GAT, CJCE, 13 juil. 2006, n°4/03] est inexistant, dès lors que la décision provisoire prise par le juge saisi à titre incident ne préjugera aucunement de la décision à prendre sur le fond par la juridiction compétente au titre de l’article 22, point 4, du règlement n° 44/2001. Ainsi, les raisons qui ont amené la Cour à une interprétation large de la compétence prévue à l’article 22, point 4, du règlement n° 44/2001 n’exigent pas que, dans un cas tel que celui de l’affaire au principal, l’application de l’article 31 dudit règlement soit écartée".

Dispositif (et motif 51) : "L’article 22, point 4, du règlement n° 44/2001 doit être interprété en ce sens qu’il ne s’oppose pas, dans des circonstances telles que celles en cause dans l’affaire au principal, à l’application de l’article 31 de ce règlement".

Bruxelles I (règl. 44/2001)

CJUE, 12 juil. 2012, Solvay, Aff. C-616/10

Aff. C-616/10Concl. P. Cruz Villalòn

Motif 24 : "(…) pour que des décisions soient considérées comme risquant d’être inconciliables, au sens de l’article 6, point 1, du règlement n° 44/2001, il ne suffit pas qu’il existe une divergence dans la solution du litige, mais encore faut-il que cette divergence s’inscrive dans le cadre d’une même situation de fait et de droit (voir arrêts du 13 juillet 2006, Roche Nederland e.a., C‑539/03, Rec. p. I‑6535, point 26 ; Freeport, précité, point 40, ainsi que Painer, précité, point 79)".

Motif 29 : "Afin d’apprécier, dans une situation telle que celle en cause au principal [demandes fondées sur la contrefaçon d'un brevet européen reprochée à deux sociétés belges et une société néerlandaise appartenant au même groupe], l’existence du lien de connexité entre les différentes demandes portées devant elle et donc du risque de décisions inconciliables si ces demandes étaient jugées séparément, il incombera à la juridiction nationale de prendre, notamment, en compte la double circonstance selon laquelle, d’une part, les défenderesses au principal sont accusées, chacune séparément, des mêmes actes de contrefaçon à l’égard des mêmes produits et, d’autre part, de tels actes de contrefaçon ont été commis dans les mêmes États membres, de sorte qu’ils portent atteinte aux mêmes parties nationales du brevet européen en cause".

Dispositif (et motif 30): "L’article 6, point 1, du règlement (CE) n° 44/2001 (…) doit être interprété en ce sens qu’une situation dans laquelle deux ou plusieurs sociétés établies dans différents États membres sont accusées, chacune séparément, dans une procédure pendante devant une juridiction d’un de ces États membres, de contrefaçon à la même partie nationale d’un brevet européen, tel qu’en vigueur dans un autre État membre, en raison d’actes réservés concernant le même produit, est susceptible de conduire à des solutions inconciliables si les causes étaient jugées séparément, au sens de cette disposition. Il appartient à la juridiction de renvoi d’apprécier l’existence d’un tel risque en tenant compte de tous les éléments pertinents du dossier".

Bruxelles I (règl. 44/2001)

CJUE, 21 févr. 2013, ProRail, Aff. C-332/11

Aff. C-332/11Concl. N. Jääskinen

Motif 39 : "… il convient de constater que l’article 33 du règlement n° 44/2001 n’est pas susceptible d’avoir une incidence sur la réponse à apporter à la question préjudicielle, étant donné que celle-ci porte sur l’obtention des preuves situées dans un autre État membre et non pas sur la reconnaissance par un État membre d’une décision rendue dans un autre État membre. Partant, il convient, afin de répondre à cette question, de se limiter à l’interprétation des articles 1er, paragraphe 1, sous b), et 17 du règlement n° 1206/2001".

Mots-Clefs: 
Bruxelles I (règl. 44/2001)
Obtention des preuves (règl. 1206/2001)

Article 25 - Reconnaissance et caractère exécutoire d'autres décisions

1. Les décisions relatives au déroulement et à la clôture d'une procédure d'insolvabilité rendues par une juridiction dont la décision d'ouverture est reconnue conformément à l'article 16 ainsi qu'un concordat approuvé par une telle juridiction sont reconnus également sans aucune autre formalité.

Bruxelles I (règl. 44/2001)
Bruxelles I bis (règl. 1215/2012)
Insolvabilité (règl. 1346/2000)

Civ. 1e, 11 févr. 1997, n° 95-11402 [Conv. Bruxelles]

Motif : "Attendu qu'il résulte de la combinaison [des articles 25 et 27.3 de la convention de Bruxellesqu'une transaction conclue entre les parties n'est pas une décision de nature à faire obstacle à la reconnaissance d'un jugement rendu entre les mêmes parties dans un autre Etat de la Communauté ; Attendu que, pour refuser la reconnaissance en France d'une décision rendue le 11 janvier 1993 par la Division du Banc de la Reine du district de Manchester, portant condamnation pécuniaire de la société française Joubert Laurencin envers la société britannique Virani limited, la cour d'appel a énoncé que cette décision est inconciliable avec la transaction ratifiée en France entre les parties, ayant l'autorité de la chose jugée et la valeur d'une décision contradictoire rendue sur le territoire de l'Etat requis ; En quoi elle a méconnu les textes susvisés".

Bruxelles I (règl. 44/2001)

CJCE, 2 avr. 2009, Gambazzi, Aff. C-394/07 [Conv. Bruxelles, art. 25]

Aff. C-394/07Concl. J. Kokott

Motif 22 : "À cet égard, il convient de rappeler que l’article 25 de la convention de Bruxelles vise, sans établir de distinction entre elles, toutes les décisions rendues par les juridictions des États contractants".

Motif 23 : "Certes, la Cour a souligné que l’ensemble des dispositions de la convention de Bruxelles, tant celles du titre II, relatives à la compétence, que celles du titre III, relatives à la reconnaissance et à l’exécution, expriment l’intention de veiller à ce que, dans le cadre des objectifs de celle-ci, les procédures menant à l’adoption de décisions judiciaires se déroulent dans le respect des droits de la défense. Toutefois, elle a estimé qu’il suffit, pour que de telles décisions entrent dans le champ d’application de ladite convention, qu’il s’agisse de décisions judiciaires qui, avant le moment où leur reconnaissance et leur exécution sont demandées dans un État autre que l’État d’origine, ont fait, ou étaient susceptibles de faire, dans cet État d’origine, l’objet, sous des modalités diverses, d’une instruction contradictoire (arrêt du 21 mai 1980, Denilauler, 125/79, Rec. p. 1553, point 13)".

Motif 25 : "Comme l’a relevé Mme l’avocat général au point 24 de ses conclusions, les décisions de la High Court sont intervenues sous la forme d’un jugement et d’une ordonnance rendus par défaut dans une procédure civile qui, en principe, suit le principe du contradictoire. Le fait que le juge ait statué comme si le défendeur, qui s’était régulièrement constitué, avait été défaillant ne saurait suffire à remettre en cause la qualification des décisions intervenues. Cette circonstance ne peut être prise en considération qu’au regard de la compatibilité desdites décisions avec l’ordre public de l’État requis".

Bruxelles I (règl. 44/2001)

CJCE, 14 oct. 2004, Mærsk Olie & Gas, Aff. C-39/02 [Conv. Bruxelles, art. 25]

Aff. C-39/02Concl. P. Léger 

Dispositif 2 : "Une décision ordonnant la création d’un fonds limitatif de responsabilité [telle que prévue par la Convention du 10 octobre 1957 et susceptible de faire l'objet d'un débat contradictoire avant que soit posée la question de sa reconnaissance ou de son exécution], est une décision de justice au sens de l’article 25 de [la] convention [de Bruxelles]".

Bruxelles I (règl. 44/2001)

CJCE, 13 juil. 1995, Hengst Import BV, Aff. C-474/93 [Conv. Bruxelles, art. 27.2]

Aff. C-474/93Concl. F.G. Jacobs 

Dispositif : "Le "decreto ingiuntivo" visé au livre quatre du code de procédure civile italien (articles 633-656) doit être considéré, accompagné de la requête introductive d'instance, comme un "acte introductif d'instance ou un acte équivalent" au sens de l'article 27, point 2, de la convention du 27 septembre 1968 (…), telle que modifiée par la convention du 9 octobre 1978 relative à l'adhésion du royaume de Danemark, de l'Irlande et du Royaume-Uni de Grande-Bretagne et d'Irlande du Nord".

Bruxelles I (règl. 44/2001)

CJCE, 2 juin 1994, Solo Kleinmotoren GmbH, Aff. C-414/92 [Conv. Bruxelles, art. 27.3]

Aff. C-414/92Concl. C. Gulmann 

Dispositif : "L'article 27, point 3, de la convention du 27 septembre 1968 (…) doit être interprété en ce sens qu'une transaction exécutoire conclue devant un juge de l'État requis en vue de mettre fin à un litige en cours ne constitue pas une "décision rendue entre les mêmes parties dans l'État requis", visée par cette disposition, qui peut faire obstacle, conformément aux dispositions de cette convention, à la reconnaissance et à l'exécution d'une décision judiciaire rendue dans un autre État contractant ".

Bruxelles I (règl. 44/2001)

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