Bruxelles I (règl. 44/2001)

Cass. (1re ch.), 29 nov. 2012, n° C.10.0094.F/1

Motif : "Après avoir rappelé les principes énoncés par l’arrêt Shevill précité, l’arrêt attaqué relève que "les [demandeurs] [...] fondent la compétence des juridictions belges pour connaître des dommages qui auraient été causés à leurs droits dans cet État sur la constatation [...] que des paris peuvent être pris en Belgique sans aucune restriction sur les sites web litigieux des [défenderesses]". 

L’arrêt attaqué énonce que la seule circonstance "que les sites web litigieux sont accessibles au public belge est impuissante à rendre compte de l’existence d’un lien de rattachement particulièrement étroit entre la contestation et les juridictions belges de nature à justifier une attribution de compétence à ces dernières", qu’en réalité, "les données propres aux sites litigieux ne fondent pas l’existence d’un lien de rattachement particulièrement étroit entre la contestation et la Belgique. [...] Les sites de paris sont accessibles aux internautes belges qui peuvent y faire enregistrer leurs paris dans la même mesure qu’ils sont accessibles aux internautes des autres États membres puisqu’il s’agit de sites ‘.com’ qui ont vocation à élargir leur marché à l’Europe entière. Le fait que ces sites n’ont pas exclu le territoire belge de leur portée ne témoigne d’aucune attention particulière au marché belge dès lors que tel est le cas pour la grande majorité des autres États. Par ailleurs, ils n’ont pas non plus créé d’extension ‘.be’ propre à la Belgique. Ils sont disponibles en plusieurs langues sans que s’y retrouvent systématiquement les deux langues les plus usitées en Belgique". 

Il considère enfin qu’"il n’est pas discuté que le nombre de paris pris par le public belge est tout à fait marginal par rapport au nombre total de paris enregistrés par ces sites", que, si, dans l’affaire Shevill, seulement cinq exemplaires des 250.000 de la publication litigieuse avaient été diffusés dans la ville où siégeait le tribunal saisi, "il existait de toute façon [dans cette affaire] un lien de rattachement particulièrement étroit entre l’atteinte à la réputation dont se plaignait la requérante et les tribunaux saisis, quel que soit le nombre d’exemplaires diffusés dans le for, dès lors que la plaignante vivait à l’endroit et subissait donc principalement l’atteinte dénoncée là-bas" et que "les [défenderesses] sont fondées à conclure en effet que leurs relations commerciales avec la Belgique sont ‘de minimis’. 

Ni par ces énonciations et considérations ni par aucune autre, l’arrêt attaqué ne justifie légalement sa décision d’accueillir les déclinatoires de compétence internationale soulevés en application du règlement (CE) 44/2001.

Le moyen, en cette branche, est fondé".

Bruxelles I (règl. 44/2001)

Com., 3 juin 2014, n° 12-18012

Motif : "Attendu que pour rejeter l'exception d'incompétence territoriale, l'arrêt, après avoir relevé que le litige soumis au tribunal de commerce de Paris porte pour l'essentiel sur la perte par les investisseurs de leurs avoirs dans la SICAV luxembourgeoise, retient que, dans la mesure où une partie des demandeurs ont souscrit après l'autorisation de commercialisation en France de la SICAV qui a été accordée par l'Autorité des marchés financiers le 25 mars 2005, est établie l'existence d'un fait causal ayant eu lieu en France et ainsi celle d'un fait dommageable s'étant produit dans ce pays ;

Attendu qu'en se déterminant ainsi, par des motifs impropres à caractériser la localisation en France d'un événement causal, la cour d'appel n'a pas donné de base légale à sa décision".

Bruxelles I (règl. 44/2001)

Com., 3 juin 2014, n° 12-18012

Motif : "C'est à bon droit que, pour apprécier si les conditions d'une situation de litispendance au sens des articles 27 du règlement (CE) du Conseil n° 44/ 2001, du 22 décembre 2000, et 21 de la convention de Lugano, du 16 septembre 1988, étaient réunies, la cour d'appel s'est référée aux prétentions formulées dans l'acte introductif d'instance devant la juridiction saisie en second lieu [alors même que, la procédure étant orale, les demandeurs auraient modifié leur demande initiale à l'audience]".

Bruxelles I (règl. 44/2001)

CJCE, 26 mars 1992, Reichert II, Aff. C-261/90 [Conv. Bruxelles, art. 16.5]

Aff. C-261/90, Concl. C. Gulmann 

Motif 26 : "Il faut prendre en considération le fait que le motif essentiel de la compétence exclusive des tribunaux du lieu d'exécution du jugement est qu'il n'appartient qu' aux tribunaux de l'État membre sur le territoire duquel l'exécution forcée est requise d'appliquer les règles concernant l'action, sur ce territoire, des autorités chargées de l'exécution forcée".

Motif 27 : "Il convient de relever (...) que le rapport établi par le comité des experts ayant élaboré le texte de la convention (JO 1979, C 59, p. 1) indique qu' il faut entendre par "contestations relatives à l'exécution des jugements" les contestations auxquelles peut donner lieu le "recours à la force, à la contrainte ou à la dépossession de biens meubles et immeubles en vue d' assurer la mise en oeuvre matérielle des décisions, des actes" et que "les difficultés nées de ces procédures sont de la compétence exclusive du tribunal du lieu de l'exécution".

Motif 28 : "Une action du type de l'action "paulienne" du droit français a pour objet (...) de protéger le droit de gage du créancier en demandant au juge compétent d' ordonner la révocation à l'égard du créancier de l'acte de disposition passé par le débiteur en fraude de ses droits. Si elle préserve ainsi les intérêts du créancier, en vue, notamment, d'une exécution forcée ultérieure de l'obligation, elle ne vise pas à faire trancher une contestation relative au "recours à la force, à la contrainte ou à la dépossession de biens meubles et immeubles en vue d' assurer la mise en oeuvre matérielle des décisions, des actes" et elle n' entre pas, par suite, dans le champ d'application de l' article 16, paragraphe 5, de la convention".

Dispositif (et motif 36): "Une action prévue par le droit national, telle l'action "paulienne" du droit français, par laquelle un créancier tend à obtenir la révocation, à son égard, d'un acte translatif de droits réels immobiliers accompli par son débiteur d' une façon qu'il estime être en fraude de ses droits ne relève pas du champ d'application des articles 5, paragraphe 3, 16, paragraphe 5, et 24 de la convention du 27 septembre 1968 (...)".

Bruxelles I (règl. 44/2001)

CJCE, 4 juil. 1985, Autoteile Service, Aff. 220/84 [Conv. Bruxelles]

Aff. 220/84Concl. C. O. Lenz 

Motif 17 : "Il résulte de la spécificité du lien exigé par l'article 16 qu'une partie ne saurait se prévaloir de la compétence que le numéro 5 de cet article attribue aux tribunaux du lieu de l'exécution pour saisir ces tribunaux, par voie d'exception, d'un litige qui relève des tribunaux d'un autre État contractant en vertu de l'article 2. L'utilisation, à une telle fin, de l'action en opposition à exécution est contraire à la répartition des compétences entre le juge du domicile du défendeur et le juge du lieu de l'exécution, voulue par la convention".

Motif 18 : "Dans le cas d'espèce, les juridictions allemandes s'étant déjà déclarées incompétentes pour connaître de la créance mise en avant au titre de compensation, le fait d'invoquer cette créance, afin de rencontrer l'exécution d'une décision relative aux dépens judiciaires encourus dans la même procédure, constitue, de la part de la partie requérante, un détournement manifeste de procédure en vue d'obtenir indirectement, des juridictions allemandes, une décision portant sur une créance pour l'examen de laquelle ces juridictions n'ont pas compétence en vertu de la convention".

Dispositif (et motif 19) : "Les actions en opposition à exécution, telles qu'elles sont prévues par l'article 767 du code allemand de procédure civile, relèvent, en tant que telles, de la règle de compétence de l'article 16, numéro 5, de la convention, mais cette dernière disposition ne permet pas, pour autant, de demander devant les tribunaux de l'État contractant du lieu d'exécution, par la voie d'une action en opposition à exécution, la compensation entre le droit en vertu duquel l'exécution est poursuivie et une créance sur laquelle les tribunaux de cet État contractant ne seraient pas compétents pour statuer si elle faisait l'objet d'une action autonome".

Bruxelles I (règl. 44/2001)

CJCE, 26 mai 2005, GIE Réunion européenne, Aff. C-77/04 [Conv. Bruxelles]

Aff. C-77/04Concl. F.G. Jacobs 

Motif 28 : "[En vertu du] rapport sur la convention concernant la compétence judiciaire et l’exécution des décisions en matière civile et commerciale, élaboré par M. Jenard (JO 1979, C 59, p. 1, 27)" (…), "la demande en garantie est définie comme l’action "qui est intentée contre un tiers par le défendeur à un procès en vue d’être tenu indemne de conséquences de ce procès"".

Motif 29 : "L’applicabilité, en l’espèce, de l’article 6, point 2, de la convention reste néanmoins soumise au respect de la condition exigeant que la demande en garantie ne soit pas formée que dans le but de traduire hors de son tribunal celui qui a été appelé".

Motif 30 : "Or, ainsi que l’ont souligné, d’une part, la Commission et, d’autre part, M. l’avocat général aux points 32 et 33 de ses conclusions, l’existence d’un lien entre les deux demandes en cause au principal est inhérente à la notion même de demande en garantie".

Motif 31 : "En effet, il existe une relation intrinsèque entre une action dirigée contre un assureur en vue de l’indemnisation des conséquences d’un événement couvert par celui-ci et la procédure par laquelle cet assureur cherche à faire contribuer un autre assureur réputé avoir couvert le même événement".

Motif 32 : "Il appartient au juge national saisi de la demande originaire de vérifier l’existence d’un tel lien, en ce sens qu’il doit s’assurer que la demande en garantie ne vise pas qu'à traduire le défendeur hors de son tribunal".

Motif 33 : "Il s’ensuit que l’article 6, point 2, de la convention n’exige l’existence d’aucun lien autre que celui qui est suffisant pour constater l’absence de détournement de for".

Dispositif 2 : "L’article 6, point 2, de ladite convention est applicable à un appel en garantie, fondé sur un cumul d’assurances, pour autant qu’il existe un lien entre la demande originaire et la demande en garantie permettant de conclure à l’absence de détournement de for".

Bruxelles I (règl. 44/2001)

Civ. 1e, 31 janv. 2006, n° 03-16980 [Conv. Bruxelles, art. 16.4]

Motif : "(...) l'article 16-4 précité qui pose une règle exclusive de compétence en matière d'inscription ou de validité de brevets, marques, dessins et modèles et autres droits analogues donnant lieu à dépôt ou à enregistrement ne s'applique pas aux litiges portant sur l'appartenance de ces droits".

Bruxelles I (règl. 44/2001)

CJCE, 15 mai 1990, Kongress Agentur Hagen, Aff. C-365/88 [Conv. Bruxelles]

Aff. C-365/88Concl. C.O. Lenz 

Dispositif 1 : "Dans l’hypothèse où un défendeur, qui est domicilié sur le territoire d’un État contractant, a été, au titre de l’article 5, initio et point 1, de la convention de Bruxelles, attrait devant le juge d’un autre État contractant, ce juge est également compétent, en vertu de l’article 6, initio et point 2, de la convention, pour connaître d’une demande en garantie formée contre une personne domiciliée sur le territoire d’un État contractant autre que celui du juge saisi de la demande originaire".

Dispositif 2 : "L’article 6, initio et point 2, doit être interprété en ce sens qu’il n’oblige pas le juge national à consentir à la demande d’appel en garantie et que celui-ci peut appliquer les règles procédurales de son droit national pour apprécier la recevabilité de la demande, sous réserve de ne pas porter atteinte à l’effet utile de la convention en la matière et, en particulier, de ne pas fonder le rejet de la demande en garantie sur le fait que le garant réside ou est domicilié sur le territoire d’un État contractant autre que celui du tribunal saisi de la demande originaire".

Bruxelles I (règl. 44/2001)

CJCE, 15 nov. 1983, Duijnstee, Aff. 288/82 [Conv. Bruxelles]

Aff. 288/82, Concl. S. Rozès 

Motif 19 : "La notion de litige "en matière d'inscription ou de validité des brevets", mentionnée à l'article 16, paragraphe 4, doit elle être considérée comme une notion autonome destinée à recevoir une application uniforme dans tous les États contractants".

Motif 22 : "Il importe d'observer que la compétence exclusive pour les litiges en matière d'inscription ou de validité des brevets, attribuée aux juridictions des États contractants sur les territoires desquels le dépôt ou l'enregistrement du brevet a été demandé ou a été effectué, est justifiée par le fait que ces juridictions sont les mieux placées pour connaître des cas dans lesquels le litige porte lui-même sur la validité du brevet ou l'existence du dépôt ou de l'enregistrement".

Motif 23 : "En revanche, ainsi qu'il est expressément mentionné dans le rapport d'experts concernant la convention de Bruxelles (JO C 59, p. 36), pour "les autres actions, y compris les actions en contrefaçon, les règles générales de la convention sont applicables". Cette indication confirme le caractère restrictif de la disposition de l'article 16, paragraphe 4".

Motif 24 : "Il s'ensuit que sont à considérer comme des litiges "en matière d'inscription ou de validité des brevets" les litiges dans lesquels l'attribution d'une compétence exclusive aux juges du lieu de délivrance du brevet est justifiée à la lumière des éléments susmentionnés, tels que les litiges portant sur la validité, l'existence ou la déchéance du brevet ou sur la revendication d'un droit de priorité au titre d'un dépôt antérieur".

Motif 25 : "Si, par contre, le litige ne porte pas lui-même sur la validité du brevet ou l'existence du dépôt ou de l'enregistrement, il faut estimer qu'aucune raison particulière ne plaide pour l'attribution d'une compétence exclusive aux juridictions de l'État contractant où le brevet a été demandé ou délivré et que, par conséquent, un tel litige ne relève pas de l'article 16, paragraphe 4".

Dispositif 3 (et motif 28) : "La notion de litige "en matière d'inscription ou de validité des brevets" ne recouvre pas un différend entre un employé, auteur d'une invention pour laquelle un brevet a été demandé ou obtenu, et son employeur lorsque le litige porte sur leurs droits respectifs sur ce brevet découlant de leur relation de travail".

Bruxelles I (règl. 44/2001)

CJUE, 13 juil. 1995, Danværn Production, Aff. C-341/93 [Conv. Bruxelles]

Aff. C-341/93Concl. P. Léger 

Motif 12 : "Les droits nationaux des États contractants distinguent en général deux situations. Premièrement, le défendeur invoque, comme moyen de défense, l'existence d'une créance dont il serait titulaire à l’encontre du demandeur et qui aurait pour effet d'éteindre, totalement ou partiellement, la créance de celui-ci. Deuxièmement, le défendeur vise, par une demande distincte présentée dans le cadre du même procès, à faire condamner le demandeur au paiement d’une dette envers lui. Dans ce dernier cas, la demande distincte peut viser un montant supérieur à celui réclamé par le demandeur, et être poursuivie même si le demandeur est débouté de sa demande".

Motif 13 :  "Sur le plan procédural, la défense fait partie intégrante de l’action intentée par le demandeur et ne nécessite donc pas que ce dernier soit "attrait" devant le for saisi de l’action, au sens de l’article 6, point 3, de la convention. Les moyens de défense susceptibles d’être invoqués et les conditions dans lesquelles ils peuvent l’être sont déterminés par les règles du droit national".

Motif 14 : "Or, l’article 6, point 3, de la convention n’est pas destiné à régler cette situation".

Motif 15 : "En revanche, une demande du défendeur tendant à une condamnation distincte du demandeur suppose la compétence du for saisi par ce dernier pour statuer sur une telle demande".

Motif 16 : "L’article 6, point 3, de la convention a précisément pour objet d’énoncer les conditions auxquelles un tribunal est compétent pour statuer sur une demande tendant au prononcé d’une condamnation distincte".

Motif 17 : "S’il est vrai que la version danoise de l’article 6, point 3, de la convention utilise le mot "modfordringer", expression générale qui peut comprendre les deux situations visées ci-dessus au point 12, la terminologie juridique d’autres États contractants reconnaît expressément la distinction entre ces deux situations. Ainsi, le droit français fait une distinction entre "demande reconventionnelle" et "moyens de défense au fond"; le droit anglais entre "counter-claim" et "set-off as a defence"; le droit allemand entre "Widerklage" et "Prozessaufrechnung", et le droit italien entre "domanda riconvenzionale" et "eccezione di compensazione". Or, les versions linguistiques pertinentes de l’article 6, point 3, de la convention reprennent expressément les expressions "demande reconventionnelle", "counter-claim", "Widerklage" et "domanda riconvenzionale"".

Dispositif (et motif 18) : "L’article 6, point 3 [de la Convention de Bruxelles] ne vise que les demandes présentées par les défendeurs tendant au prononcé d’une condamnation distincte. Il ne vise pas la situation où un défendeur invoque comme simple moyen de défense une créance dont il serait titulaire à l’encontre du demandeur. Les moyens de défense susceptibles d’être invoqués et les conditions dans lesquelles ils peuvent l’être sont régis par le droit national".

Bruxelles I (règl. 44/2001)

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