Motif 24 : "(…), relève de la notion de « matière civile et commerciale » une action opposant les autorités d’un État membre à des professionnels établis dans un autre État membre dans le cadre de laquelle ces autorités demandent, à titre principal, à ce que soit constatée l’existence d’infractions constituant des pratiques commerciales déloyales prétendument illégales et à ce que soit ordonnée la cessation de celles-ci ainsi que, à titre accessoire, à ce que soient ordonnées des mesures de publicité et à ce que soit imposée une astreinte (voir, en ce sens, arrêt du 16 juillet 2020, Movic e.a., C‑73/19, EU:C:2020:568, point 64)".
Motif 25 : "Tel n’est en revanche pas le cas d’une demande tendant à se voir octroyer la compétence d’établir l’existence d’infractions futures par simple procès-verbal rédigé par un fonctionnaire de l’autorité publique en cause, une telle demande portant en réalité sur des pouvoirs exorbitants par rapport aux règles de droit commun applicables dans les relations entre particuliers (voir, en ce sens, arrêt du 16 juillet 2020, Movic e.a., C‑73/19, EU:C:2020:568, point 62)".
Motif 26 : "En l’occurrence, il ressort de la décision de renvoi que, d’une part, l’action en cause au principal, qui a pour objet la défense de l’ordre public économique français, a été introduite sur la base d’éléments de preuve obtenus dans le cadre de visites sur les lieux et de saisies de documents. Or, de tels pouvoirs d’enquête, même si leur exercice doit être préalablement autorisé par le juge, n’en demeurent pas moins exorbitants par rapport au droit commun, en particulier parce qu’ils ne peuvent être mis en œuvre par des personnes privées et parce que, conformément aux dispositions nationales pertinentes, toute personne s’opposant à l’exercice de telles mesures encourt une peine d’emprisonnement ainsi qu’une amende de 300000 euros".
Motif 27 : "D’autre part, l’action au principal tend, notamment, au prononcé de l’amende civile visée à l’article L 442–6, III, deuxième alinéa, du code de commerce. Or, s’il est vrai qu’une telle amende doit être infligée par la juridiction compétente, seuls le ministre chargé de l’économie et le ministère public peuvent en demander le prononcé. En particulier, en vertu de l’article L 442-6 du code de commerce, la victime de pratiques restrictives de concurrence ne peut agir qu’en réparation du préjudice causé par ces pratiques et solliciter la cessation desdites pratiques ou la nullité de la clause concernée".
Dispositif : "L’article 1er, paragraphe 1, du règlement (UE) n° 1215/2012 (…), doit être interprété en ce sens que : la notion de « matière civile et commerciale », au sens de cette disposition, n’inclut pas l’action d’une autorité publique d’un État membre contre des sociétés établies dans un autre État membre aux fins de faire reconnaître, sanctionner et cesser des pratiques restrictives de concurrence à l’égard de fournisseurs établis dans le premier État membre, lorsque cette autorité publique exerce des pouvoirs d’agir en justice ou des pouvoirs d’enquête exorbitants par rapport aux règles de droit commun applicables dans les relations entre particuliers".