Groupe de sociétés

Soc., 18 déc. 2013, n° 12-25686 à 12-25734

Motifs : "[...] selon l'interprétation faite par la Cour de justice des Communautés européennes des dispositions de la Convention de Bruxelles du 27 septembre 1968, qui est transposable pour l'application de l'article 19 du Règlement n° 44/2001/CE, l'employeur est défini comme la personne pour le compte de laquelle le travailleur accomplit pendant un certain temps, en sa faveur et sous sa direction, des prestations en contrepartie desquelles elle verse une rémunération ; [la Cour d'appel relève que] le rapport de l'expert du comité d'entreprise de la société Sodimédical, qui conclut que celle-ci, en tant qu'unité de production, ne possède aucune latitude pour développer et prospecter de nouveaux débouchés, et que la société Lohmann & Rauscher France, dont c'était la responsabilité, a retiré brutalement sa clientèle à la société de production et ce, sans qu'aucune alternative économique n'ait pu être présentée et a fortiori mise en oeuvre, que le rapport d'enquête du juge-commissaire, dont il résulte que la société Sodimédical est une filiale à 100 % de Lohmann & Rauscher France, elle-même filiale à 100 % de Lohmann & Rauscher GmbH et que le président du conseil d'administration de la société de droit allemand est également celui du conseil d'administration de la société mère française, que, depuis deux ans, Sodimédical n'avait pour client unique que la société Lohmann & Rauscher France, que toute la comptabilité Sodimedical est traitée chez Lohmann & Rauscher France, que les budgets Sodimédical sont validés directement par l'Allemagne (donc Lohmann & Rauscher GmbH & Co KG), via Lohmann & Rauscher France, que la société de droit allemand a consenti une avance de trésorerie à Sodimédical et un abandon de créances au profit de Lohmann & Rauscher France, et que les conclusions du juge-commissaire, selon lesquelles il appartiendra à l'administrateur judiciaire d'avoir la possibilité d'appeler directement en comblement de passif la société Lohmann & Rauscher France ainsi qu'éventuellement la société Lohmann & Rauscher GmbH & Co KG, justifient d'une apparence de confusion d'intérêts, d'activités et de direction entre la maison-mère allemande via Lohmann et Rauscher France et la société Sodimédical, qui ne disposait d'aucune autonomie ; 

Qu'en statuant ainsi, alors qu'il ne résultait pas de ses constatations une situation apparente de coemploi constituée par une confusion d'intérêts, d'activités et de direction se manifestant par une immixtion de la société mère dans la gestion économique et sociale de sa filiale et justifiant sa compétence à l'égard de la société Lohmann & Rauscher GmbH & Co KG , la cour d'appel a violé [l'article 19]".

Bruxelles I (règl. 44/2001)

CJUE, 17 oct. 2013, OTP Bank, Aff. C-519/12

Dispositif : "Ne saurait être regardé comme relevant de la "matière contractuelle" au sens de l’article 5, point 1, sous a), du règlement (CE) n° 44/2001 (...), un litige tel que celui au principal, dans lequel la législation nationale impose à une personne de répondre des dettes d’une société qu’elle contrôle, faute pour cette personne d’avoir satisfait aux obligations de déclaration consécutives à la prise de contrôle de cette société".

Bruxelles I (règl. 44/2001)

Civ. 1e, 26 oct. 2011, n° 10-17026

Motif : "Attendu que la cour d'appel a relevé que l'action introduite par la société Espace conseil à l'encontre des sociétés Italiana per Condotte d'Acqua Spa et Ferfina Spa avait pour fondement les dispositions de l'article 1382 du code civil du fait de l'immixtion supposée de ces sociétés dans la gestion de la société Ferfina France, de sorte qu'elle était de nature délictuelle ou quasi délictuelle au sens de l'article 5-3 du règlement communautaire ; que par ce seul motif, l'arrêt est légalement justifié".

Bruxelles I (règl. 44/2001)

CJCE, 11 janv. 1990, Dumez, Aff. C-220/88 [Conv. Bruxelles]

Aff. C-220/88Concl. M. Darmon 

Motif 14 : "Dans une espèce comme celle de l'affaire au principal, le dommage allégué n'est que la conséquence indirecte du préjudice éprouvé initialement par d'autres personnes juridiques qui ont été directement victimes du dommage matérialisé en un lieu différent de celui où la victime indirecte a ensuite subi le préjudice".

Motif 20 : "Si, conformément à la jurisprudence de la Cour (arrêt du 30 novembre 1976, précité), la notion de "lieu où le fait dommageable s'est produit" qui figure à l'article 5, point 3, de la convention peut viser le lieu où le dommage est survenu, cette dernière notion ne saurait être comprise que comme désignant le lieu où le fait causal, engageant la responsabilité délictuelle ou quasi délictuelle, a produit directement ses effets dommageables à l'égard de celui qui en est la victime immédiate".

Motif 21 : "Le lieu où s'est manifesté le dommage initial présente d'ailleurs généralement un rapport étroit avec les autres éléments constitutifs de la responsabilité, alors que tel n'est pas le cas, le plus souvent, du domicile de la victime indirecte".

Dispositif (et motif 22) : "La règle de compétence juridictionnelle énoncée à l'article 5, point 3, de la convention du 27 septembre 1968 (…) ne peut être interprétée comme autorisant un demandeur qui invoque un dommage qu'il prétend être la conséquence du préjudice subi par d'autres personnes, victimes directes du fait dommageable, à attraire l'auteur de ce fait devant les juridictions du lieu où il a lui-même constaté le dommage dans son patrimoine".

Bruxelles I (règl. 44/2001)

T. com. Nevers, 22 mars 2013

Motif : "conformément à la jurisprudence de la Cour de justice de l’Union européenne, une procédure de redressement judiciaire peut être étendue sur le fondement de la confusion des patrimoines ou de la fictivité de la personne morale, à une autre personne morale domiciliée à l’étranger dès lors que deux critères cumulatifs sont établis :

– des éléments objectifs et vérifiables devant permettre d’établir l’existence d’un centre des intérêts principaux différent du siège statutaire ; et

– une appréciation globale de l’ensemble des éléments pertinents devant permettre d’établir que le centre de direction et de contrôle de la société est différent du siège statutaire.

(…) Qu’il convient, selon une jurisprudence européenne désormais bien établie, de s’appuyer sur des éléments objectifs et vérifiables par les tiers permettant de prouver l’existence d’une situation réelle différente de celle que la localisation audit siège statutaire est censée refléter

Qu’un faisceau d’indices concordants et vérifiables par les tiers démontre que le centre des intérêts principaux de l’entité « Beltank » est en France et plus particulièrement à Nevers [lieu de la direction stratégique et opérationnelle des différentes entités connues aux yeux des tiers sous le nom "Beltank", identité de l'actionnaire majoritaire, domicile des salariés, domicile des clients, lieu des livraisons, lieu d'exploitation et d'assurance des bateaux, lieu des négociations commerciales avec le principal client…]".

Insolvabilité (règl. 1346/2000)

Com., 5 juin 2012, n° 11-22466

Motif : "[Viole l’article 3.1 du règl. CE n° 1346/2000 le président d’une cour d’appel dont] l'ordonnance retient que l'exception d'incompétence et l'irrecevabilité de l'action aux fins d'extension [d’une procédure de liquidation ouverte en France] soulevées par [une société dont le siège statutaire est au Luxembourg] (…) ont déjà été écartées en première instance par des motifs, tirés de la simple lecture d'un jugement correctionnel, dont il appartient à la seule cour d'appel saisie au fond d'examiner le bien-fondé, [alors qu’il aurait dû] apprécier le caractère sérieux du moyen invoqué par la [requérante] à l'appui de son appel".

Insolvabilité (règl. 1346/2000)

Com., 10 mai 2012, n° 09-12642

Motif : "en se déterminant [pour fonder sa compétence] par [d]es motifs inopérants, sans rechercher si le centre des intérêts principaux de la société Rastelli se trouvait situé sur le territoire français, ce qu'elle ne pouvait déduire de la seule constatation de la confusion de son patrimoine avec celui de la société Médiasucre, mais exclusivement d'une appréciation globale de l'ensemble des éléments pertinents permettant d'établir que, de manière vérifiable par les tiers, le centre effectif de direction et de contrôle de la société Rastelli se situait en France et non au lieu de son siège statutaire en Italie, la cour d'appel n'a pas donné de base légale à sa décision".

Insolvabilité (règl. 1346/2000)

Com., 13 avr. 2010, n° 09-12642

Questions :

"- Lorsqu'une juridiction d'un État membre ouvre la procédure principale d'insolvabilité d'un débiteur, en retenant que le centre de ses intérêts principaux est situé sur le territoire de cet État, le règlement (CE) n° 1346/2000 (…) s'oppose-t-il à l'application par cette juridiction d'une règle de son droit national lui donnant compétence pour étendre la procédure à une société dont le siège statutaire est fixé dans un autre État membre, sur le seul fondement de la constatation d'une confusion des patrimoines du débiteur et de cette société ?

- Si l'action aux fins d'extension doit s'analyser comme l'ouverture d'une nouvelle procédure d'insolvabilité, subordonnée, pour que le juge de l'Etat membre initialement saisi puisse en connaître, à la démonstration que la société visée par l'extension ait dans cet Etat le centre de ses intérêts principaux, cette démonstration peut-elle découler du seul constat de la confusion des patrimoines?"

Insolvabilité (règl. 1346/2000)

CJUE, 15 déc. 2011, Rastelli Davide e C. Snc, Aff. C‑191/10

Dispositif 1 : "Le règlement (CE) n° 1346/2000 du Conseil, du 29 mai 2000, (…), doit être interprété en ce sens qu’une juridiction d’un État membre qui a ouvert une procédure principale d’insolvabilité à l’encontre d’une société, en retenant que le centre des intérêts principaux de celle-ci est situé sur le territoire de cet État, ne peut étendre, en application d’une règle de son droit national, cette procédure à une deuxième société, dont le siège statutaire est situé dans un autre État membre, qu’à la condition qu’il soit démontré que le centre des intérêts principaux de cette dernière se trouve dans le premier État membre".

Dispositif 2 : "Le règlement n° 1346/2000 doit être interprété en ce sens que dans l’hypothèse où une société, dont le siège statutaire est situé sur le territoire d’un État membre, est visée par une action tendant à lui étendre les effets d’une procédure d’insolvabilité ouverte dans un autre État membre à l’encontre d’une autre société établie sur le territoire de ce dernier État, la seule constatation de la confusion des patrimoines de ces sociétés ne suffit pas à démontrer que le centre des intérêts principaux de la société visée par ladite action se trouve également dans ce dernier État. Il est nécessaire, pour renverser la présomption selon laquelle ce centre se trouve au lieu du siège statutaire, qu’une appréciation globale de l’ensemble des éléments pertinents permette d’établir que, de manière vérifiable par les tiers, le centre effectif de direction et de contrôle de la société visée par l’action aux fins d’extension se situe dans l’État membre où a été ouverte la procédure d’insolvabilité initiale".

Insolvabilité (règl. 1346/2000)

CJCE, 2 mai 2006, Eurofood, Aff. C-341/04

Aff. C-341/04Concl. F. Jacobs

Dispositif 1: "Lorsqu’un débiteur est une filiale dont le siège statutaire et celui de sa société mère sont situés dans deux États membres différents, la présomption énoncée à l’article 3, paragraphe 1, seconde phrase, du règlement (CE) n° 1346/2000 du Conseil (…), selon laquelle le centre des intérêts principaux de cette filiale est situé dans l’État membre où se trouve son siège statutaire, ne peut être réfutée que si des éléments objectifs et vérifiables par les tiers permettent d’établir l’existence d’une situation réelle différente de celle que la localisation audit siège statutaire est censée refléter. Tel pourrait être notamment le cas d’une société qui n’exercerait aucune activité sur le territoire de l’État membre où est situé son siège social. En revanche, lorsqu’une société exerce son activité sur le territoire de l’État membre où est situé son siège social, le fait que ses choix économiques soient ou puissent être contrôlés par une société mère établie dans un autre État membre ne suffit pas pour écarter la présomption prévue par ledit règlement".

Insolvabilité (règl. 1346/2000)

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